Photo-graphies et un peu plus…

A bonne distance

Allez hop, je vous emmène en voyage mais je vous préviens, c’est une histoire triste à laquelle j’ai cherché une issue plus légère ! Donc, nous y allons. Très haut. Dans le grand nord. A plus de 69°. Nous sommes en décembre, le 31 plus précisément. Oui, c’est le réveillon. Il fait nuit. Ce qui n’est pas un réel indice car à cette période de l’année, c’est le cas 20 heures par jour. Cela ne signifie pas pour autant qu’il fasse jour les 4 autres heures. Non, ce serait trop, toute cette lumière… Donc, il fait nuit noire et c’est le soir. Il fait nuit noire, c’est le soir, et je suis à table dans un restaurant typiquement norvégien à manger un plat typiquement norvégien dont je serais bien incapable de vous donner le nom quand mon oreille se met à traîner vers la table d’à côté. Heureusement, elle est discrète, ce qui lui permet de tout écouter sans se faire remarquer.

C’est une bien sombre histoire que narre la jeune serveuse à des clients anglophones qui lui demandent si les elfes existent – non visiblement, mais manifestement, une proportion non négligeable de la population croit le contraire – et si l’on peut voir des ours polaires sur le continent voire, ici, dans les environs de Tromsø. Lumière tamisée dans l’auberge toute de bois vêtue, la tonalité des confidences et des histoires qui font peur. Cessez de trembler, il n’y a pas d’ours polaire à Tromsø. En revanche, au Svalbard, cet archipel aux confins du monde d’en haut, il y en a encore un certain nombre. La serveuse prend alors une voix caverneuse pour raconter l’histoire de ces deux jeunes parties marcher seules, un peu naïvement, hors des zones habitées. Elles se sont retrouvées face à un énorme ours polaire – forcément, avec un « petit » ours polaire, le récit est instantanément moins percutant – et n’ont pas réussi à fuir. Une seule a survécu à l’attaque*… Inutile de vous préciser que cela a jeté un froid glacial dans le maigre auditoire fort impressionnable. Dès lors, sans savoir si ce récit était authentique, j’ai décidé de me contenter d’une rencontre avec la version plastique inoffensive – sauf pour le poteau de balisage – prête à prendre place au musée polaire de la ville…

* Depuis j’ai vérifié les faits car la mémoire – celle de la serveuse peut-être encline à diffuser des mythes ; la mienne, très imparfaite – peut jouer des tours : la réalité était légèrement différente – pas dans l’issue malheureusement – et tout est .

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La guirlande humaine vous souhaite un joyeux Noël

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La vie en bleu

La vie du photographe est ponctuée de diverses questions existentielles, lesquelles sont essentiellement liées à la lumière. Rien d’étonnant à cela dans la mesure où photographier, c’est, littéralement, écrire avec la lumière. C’est donc en analysant cette lumière ambiante disponible – extérieure, intérieure – et en la corrélant à son intention, en somme à l’image qu’il a déjà mentalement créée, qu’il va ensuite définir précisément le temps pendant lequel il la laissera passer et dans quelles proportions, l’un et l’autre dépendant intimement d’un troisième facteur, la sensibilité. Terme polysémique qui s’adresse aussi bien à l’outil qu’à la personne le manipulant.

Mais la lumière, c’est aussi une couleur, et même une température de couleurs. Ne parle-t-on pas justement de couleurs chaudes ou froides ? Ces subtilités font émerger une nouvelle question existentielle un brin obscure dans l’esprit calculateur du faiseur d’images : quid de la balance des blancs, celle-là même qui doit rendre leur pureté à ses bouts d’image encrés de blanc, et que, justement, la couleur de la lumière – celle, orange d’un coucher de soleil par exemple – altère ? La question m’a longtemps parasitée là-haut. Par 69°39’30 » Nord. En plein hiver. Alors même que le soleil n’a jamais dépassé l’horizon, que la vie n’était partiellement éclairée que 2h par jour par un halo de lumière résiduelle avant de sombrer 22 heures durant dans l’obscurité et surtout que, pendant ce court laps de temps, maigre répit pour les animaux diurnes que nous sommes, le monde extérieur ne se dévoilait qu’à travers le prisme d’un délicat autant qu’inhabituel filtre bleu, comme si l’air lui-même, devenu matière, en était teinté… Voilà donc la question que je me posais sans répit et sans réponse : que faire quand le blanc n’existe plus ?

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Depuis la nuit des temps

Cela fait bien longtemps que je souhaite vous parler d’elle, et, par ricochet, du temps. De lui, en réalité, j’en parle tout le temps… « Depuis la nuit des temps » donc – environ 492 000 occurrences en 0,38 seconde dans un moteur de recherche dont l’ambition est de vous prouver qu’il peut répondre à toutes vos questions en un rien de temps, et même moins que ça – fait partie de ces expressions légèrement sur-évaluées à mes yeux et un brin démagogues. Elle est sublime, indéniablement poétique en plus de nous transporter dans les « confins des sphères étoilées » chers à Baudelaire, mais enfin, la nuit des temps, concrètement, c’est quand ?

Je vous taquine… J’ai bien conscience que ces quelques mots font écho à un événement, une action, un comportement qui se reproduit et perdure depuis très très longtemps, si longtemps en fait, que nous avons l’impression qu’il ou elle existe depuis toujours. C’est-à-dire, quoi, 14 milliards d’années ? Une vision bien réductrice de l’univers qui laisse entendre qu’il n’y avait rien avant le Big Bang, ce qui relève du même anthropocentrisme que de penser que nous sommes seuls dans cet incommensurable univers, même si, dans les deux cas, nous n’en savons fichtrement rien. Par ailleurs, cette impression de permanence induit aussi que le temps a lui-même toujours existé… alors même que les théories de la relativité restreinte puis générale ont conduit Albert Einstein – dont, petite parenthèse, le cerveau a été prélevé, subtilisé et caché des années durant par le Dr Thomas Harvey, le médecin légiste qui avait procédé à son autopsie, post-mortem je précise, et qui croyait y trouver les stigmates de son incroyable intelligence – à déclarer que le temps n’existait pas en tant que tel, c’est-à-dire indépendamment de l’espace. D’où la consécration du nouveau couple espace-temps. Je vous rassure immédiatement, cela ne remet absolument pas en question la réalité des rendez-vous que vous avez pris pour demain matin, ni celle, moins glorieuse, de vos retards récurrents.

Le plus déconcertant reste d’être obsédé – et je pèse mes mots : la perception du temps qui passe peut être une obsession, même si c’est inexact d’en parler en ces termes, car le temps lui-même a toujours la même durée, c’est simplement la façon dont nous utilisons cette durée qui évolue et crée cette impression de temps qui s’accélère – par « quelque chose », une entité impalpable, invisible, inodore, silencieuse qui n’existe pas « en vrai ». Mais encore faudrait-il ensuite s’assurer de ce qu’est le vrai. Difficile d’en sortir indemne…

Revenons donc à nos moutons. Ceux que l’on compte le soir dans l’espoir de s’endormir plus rapidement. Cette méthode a d’ailleurs un petit quelque chose de suranné en 2015, puisque, comme partout sur cette Terre, les populations ont opéré une profonde translation des campagnes vers les villes, où, comme chacun sait, nous avons plus de probabilité de croiser les moutons débités dans des barquettes sous film plastique que bêlant dans des champs qui ne sont plus qu’un vaste souvenir. Imaginez un peu le cauchemar : une côte, deux côtes, trois côtes… Pas très convaincant pour trouver le sommeil ! Et finalement, cette expression renvoie elle-même à des temps lointains, moins urbains, où compter les moutons avait un sens… Mais faisons fi des bouleversements planétaires et autres redistributions humaines… Que nous ne soyons plus entourés de moutons n’a pas de réelle importance, c’est une image. Ce qui lui suffit amplement à générer l’effet escompté. La preuve ? Depuis, la nuit détend.

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Illusion haptique

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Le bleu est une couleur...

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La nuit est claire

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L'attrape-étoile

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L'arbre à lumière

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