Que vous soyez en avion, en bus, en train ou en bateau, si le placement est libre, un chaos certain s’empare instinctivement du troupeau d’humains qui cherche à l’intégrer. Le voilà qui trépigne à l’entrée dudit véhicule comme si sa vie en dépendait. Le Français est particulièrement doué dans cette indiscipline perçue comme un manque d’éducation à l’étranger. « Vous êtes arrivé avant ? Et alors ! Que c’est petit de s’attacher à ce point à ces détails chronologiques… Tout le monde finira par entrer ! ».
Entrer oui, certes, mais l’ambition de l’amnésique des bonnes manières aux propos nonchalants va forcément au-delà du simple fait d’avoir une place, puisqu’il a déjà payé pour cette dernière. Le but, c’est d’avoir une bon-ne place. Mêlée à l’entrée, croche-pieds, bousculades, dénigrement, pression sont les travers les plus avouables du « premier arrivé, premier servi ». Une fois dans le ventre du véhicule, on se presse lentement vers celle que l’on estime être sa place idéale. Heureusement, la bonne place de l’un peut être considérée comme mauvaise par l’autre… C’est parfois ce qui nous sauve du duel à l’épée à l’orée de la forêt encore pleine de sommeil.
Sur un bateau par exemple, à la belle saison, on a presque tous envie de squatter les ponts extérieurs, où, comme ailleurs, les places sont limitées. Tout le monde s’y presse au début, au sens propre, maudissant son voisin et le sien également d’éprouver la même envie. Heure de pointe sur la plate-forme, le tableau doit sembler ridicule du haut de la cabine de pilotage. Mais petit à petit, au fur et à mesure que le bateau s’éloigne des côtes protégées, qu’il navigue seul dans un immense courant d’air, le vent et le froid s’engouffrent, poussant une partie des passagers à se déporter vers l’intérieur, à l’abri. Petite joie sur le visage des résistants dont l’espace vital croît proportionnellement à l’exode des plus frileux. Et pour entériner définitivement cette victoire par forfait, les plus courageux d’entre eux n’hésitent pas à marquer leur territoire en s’allongeant et en se prélassant sans complexe au soleil comme si plus rien d’autre n’existait…
Bien, après cette trêve verbale, reprenons le chemin tracé par les mots… A l’étranger, ce sur quoi nous nous arrêtons en premier sont les différences flagrantes avec nos propres us et coutumes. Manger dehors comme on dit, au restaurant donc, fait ainsi partie de ces premiers moments révélateurs des tendances locales… Laissons-nous donc aller à un petit compar-hâtif France/USA-Canada/Japon et asseyons-nous à une table d’un restaurant « classique », c’est-à-dire ni trop bon marché, ni trop cher, extrêmes qui pourraient avoir une incidence sur l’attitude des serveurs(euses). Car c’est de celle-ci dont il va s’agir à partir de maintenant. Lorsqu’un Français s’installe à une table nord-américaine, il ne peut être qu’heureusement étonné de la gentillesse avec laquelle on s’occupe de lui. Etonné car il a généralement des a priori négatifs sur les A-mé-ri-cains. Que celui-ci soit en mesure de s’étonner laisse aussi supposer que, chez lui, cela ne se passe pas exactement comme ça… Là où le (la) serveur(euse) nord-américain(e) vient lui demander toutes les 7’32 » si tout se passe bien (sans envisager pour autant qu’il puisse lui répondre négativement), ou lui remplir son verre d’eau glacée dès qu’il a bu une gorgée (un principe de base : toujours avoir la coupe pleine), le français (parisien pour ne pas faire trop de généralités) mettra un certain temps à l’accueillir sur le pas de la porte, puis à lui apporter le menu… Il faudra savoir capter son regard malgré ses œillères naturelles et le regarder plusieurs fois de façon insistante pour qu’il vienne lui prendre sa commande. Parfois, il se trompera dans l’attribution des plats à la tablée et il oubliera certainement d’apporter une nouvelle carafe d’eau même après la troisième sollicitation… Pour justifier cette approche un peu rustre, l’on se dira que le service – fixe – est compris dans le prix en hexagone. Ce qui n’est pas le cas outre-atlantique où, selon le service rendu, le client peut laisser entre 10 et 25% de la note au serveur (ou serveuse, mais vous avez compris). Somme qui constitue par ailleurs la majeure partie de leur salaire. Autant dire que la gentillesse et la prévenance – même si elles sont très agréables – ne sont ni gratuites ni désintéressés. D’où, parfois, le sentiment d’une certaine fausseté ou hypocrisie face à tant de sollicitude. Dernière remarque – vous savez bien, cette façon de réussir à tout critiquer et à se méfier de tout – typiquement française à mon sens donc, à prendre avec des pincettes.
Changement de continent. Changement de mœurs. D’abord, quand vous vous approchez d’un restaurant japonais – pas celui qui fait des brochettes à côté de votre ciné préféré, un vrai restaurant japonais au Japon – on vous remercie une première fois tout en vous souhaitant la bienvenue. En chœur, ça sonne mieux. Pour l’entrée discrète, c’est raté. Ensuite, on vous remercie d’avoir attendu à peine deux minutes que l’on vous place, puis à nouveau lorsque l’on vous donne ces serviettes chaudes et humides pour enlever toutes ces petites bactéries et microbes qui ont colonisé vos mains depuis la dernière fois où vous les avez plongées sous l’eau… Courbette comprise, on vous remercie ensuite quand on vous donne le menu, et quand on vous prend la commande, et quand on vous rapporte vos plats, et quand on vous amène du thé… Evidemment, lorsque vous vous levez pour aller payer, ceux qui ne vous ont pas servis, vous remercient aussi. Ainsi que la personne à qui vous réglez l’addition, qui est parfois celle qui vous raccompagne à la porte, vous l’ouvre et vous lance, à tue-tête et avec un enthousiasme sincère qui donnerait 30 minutes d’énergie pure à tout neurasthénique : arigato gozaimashita !
Vous imaginez un garçon de café parisien ou une serveuse vous ouvrir la porte et vous lancer « Merci beaucoup d’être venu ! » ? Tout le monde se retournerait, se disant, au mieux qu’il en fait un peu trop, au pire, qu’il est probablement un peu simplet et que c’est une bonne action qu’a faite le gérant en l’embauchant… Enfin, on n’y croirait pas une seconde ! Ce qui est bien dommage… La question que je lis sur toutes les lèvres que je ne vois pas à travers cet écran ? Et le service alors, compris ou pas ? Et bien, rien, nichts, nada, zéro. Non seulement le service est compris dans la note, pas majorée pour autant, mais en plus, on ne doit pas laisser de pourboire au Japon, même au sens où nous l’entendons en France. On vous sert avec déférence et respect car c’est ainsi que cela se passe et pas autrement. C’est étonnant et aussi intimidant il faut l’avouer… Que faire, en effet, de tous ces remerciements ? Cette extrême politesse cache forcément quelque chose, non ?
En pratique, toutes les photos figurant sur ce site sont en vente. N'hésitez pas à me contacter pour plus de renseignements !
Un tour du Soleil en duos : 6e année en cours
Pour (re)découvrir en un clin d’œil et sur une seule page les micro-histoires photographiques publiées en ces lieux virtuels :
- entre le 22/02/2010 et le 22/02/2011, voici Un tour du Soleil en duos…
Tomber par hasard sur un feu d’artifice hivernal est un luxe, qui justifie cette petite redondance d’éclats de lumières multicolores zébrant un ciel d’un noir profond en ce jour marqué d’une croix par les petits et les grands. Au-delà du spectacle céleste concocté avec minutie par les artificiers, c’est la musique composée par les explosions […]
Si j’habitais Berlin et si j’avais à donner rendez-vous à quelqu’un sur l’immense Alexanderplatz, je choisirais certainement cet endroit aussi. Ce ne serait certes pas très original, mais j’aime l’idée de me retrouver sous cette horloge universelle – Urania pour les intimes, Weltzeituhr pour les germanophones – coiffée d’une version miniature – et simplifiée – […]