Certains prétendent que l’on ne rentre jamais vraiment indemne d’un hivernage d’un an, loin de tout, sur une petite île perdue au milieu de l’océan, à croiser les mêmes personnes chaque jour ou presque, par ailleurs bien moins nombreuses que les populations de manchots, d’éléphants de mer et d’otaries, les vrais locataires terrestres du caillou. Sans doute n’ont-ils pas entièrement tort…
Cette femme, en train de repasser son pull sur le Pont Neuf, est certainement atteinte de ce que j’appelle « une urgence du moment ». Vous connaissez, j’en suis certaine, même si vous avez donné un autre nom (lequel, ça m’intéresse ?) à cet étrange phénomène qui vous prend, de temps en temps, sans crier gare… Car « l’urgence du moment », concrètement, c’est ce besoin irrépressible que vous pouvez ressentir de réaliser une action précise, là, dans l’instant, alors qu’il n’y a fondamentalement aucune urgence et que vous êtes parfois même déjà occupé à faire quelque chose d’autre. L’urgence du moment, c’est une sorte de force ultime, supérieure à votre raison, qui vous intime l’ordre de tout stopper pour en finir avec elle. Evidemment, l’action précise en question est souvent futile. Là, tout de suite, sans plus attendre, que vous soyez chez vous ou ailleurs, vous devez vous couper les ongles ou ceux de votre mari, repasser votre tenue en pleine rue, trier vos chaussettes noires qui sont toutes mélangées ce qui n’est pas pratique le matin, couper ces fils qui dépassent de votre pull, laver sa voiture, ranger cette pile de livres que vous ne supportez plus aujourd’hui alors qu’elle est là depuis un mois (ce qui peut expliquer cela)… L’urgence du moment, accomplie en présence d’un témoin extérieur, n’est pas toujours facile à assumer (voire comprise) :
– Mais que fais-tu ?
– Cela se voit non ? Je passe le balai !
– Mais il est 23h44… ça peut peut-être attendre demain, non ?
– Et bien non justement ! Cela ne peut pas attendre demain ! J’en ai marre de cette poussière ! Elle m’insupporte ! C’est incroyable tout ce que cette ville charrie comme saletés ! Donc, je passe le balai, je dormirai mieux…
Un conseil : ne jamais confronter une victime d’une urgence du moment à sa propre étrangeté. Elle a tout à fait conscience d’être quasi possédée par un enjeu suprême totalement artificiel, ce qui a d’ailleurs le don de l’énerver car, dans ces circonstances, elle ne maîtrise rien. Donc, évitez d’en rajouter une couche… Si vous voyez une personne agir bizarrement, s’interrompre brutalement dans sa lecture, son tri de photos, sa recette pour accomplir une mission dont elle se croit investie et qui vous apparaît plutôt déplacée à cet instant, surtout, faites comme si de rien était ! Une fois la chose faite, comme si elle se réveillait d’une courte séance d’hypnose, la personne reprendra l’activité qu’elle a temporairement abandonnée avec le sourire de quelqu’un qui a enfin réussi à barrer une ligne sur sa liste de choses à faire !
Cet arbre n’existe plus. Avec ses voisins, ils ont été coupés et remplacés par de frêles arbustes qui ont probablement eu froid cet hiver. Je me demande bien ce qu’il a pu devenir. Si cela n’avait tenu qu’à moi, je l’aurais gardé. Car, malgré les apparences, cet arbre n’est pas le fruit d’un montage numérique… Il était non seulement réel, mais aussi bien vivant ! J’ai tout envisagé : de la colle à bois, une bonne blague des jardiniers de la ville de Paris, les expériences farfelues d’un généticien branché sylviculture chimérique… Pourtant, je ne comprends toujours pas comment cette greffe a pu être possible, permettant à ce spécimen d’arborer chaque printemps de beaux bourgeons et chaque été, d’épaisses feuilles vertes… S’il existait un cirque des arbres, je suis sûre que celui-ci, au charme indéniable, en serait et que les visiteurs se presseraient pour lui murmurer quelques secrets à l’écorce avec l’espoir qu’il leur livre le sien !
Déambulation aléatoire dans les rues étroites et pentues de La Valette à me diriger selon ce qu’offre l’une ou l’autre au regard. Je choisis de suivre celle qui attise ma curiosité. Une pluie légère se met à tomber. Il faisait beau en partant. Je ne suis pas équipée… Mais le timing est parfait, il est grand temps de se poser pour manger un morceau, comme on dit. J’opte pour une terrasse près d’une artère semi-piétonne. Pour voir la vi(ll)e défiler. M’installe à une petite table ronde à la position stratégique. La serveuse m’apporte rapidement la carte. Je commande aussi vite. Pasta. Et un café au lait. En même temps. Cette simultanéité est très importante. A posteriori, le mélange est tout simplement un non sens. Sur le moment, il est totalement indigeste. Et pourtant, deux jours plus tard, non vaccinée, je me laisse tenter par un sandwich que j’arrose d’un nouveau café au lait. Je ne suis pourtant pas en train de faire une expérience scientifique sur la résistance de mon estomac à la bêtise. Je suis en vacances. C’est exactement là que se situe le cœur du problème. J’ai pu le vérifier, les vacances conduisent parfois à adopter des régimes alimentaires et comportements culinaires que nous n’oserions pas avoir en d’autres circonstances, car en ces circonstances normales, nous savons pertinemment qu’ils sont aberrants ! Mais bon, en vacances, c’est comme le mardi à une époque, tout est permis !
En pratique, toutes les photos figurant sur ce site sont en vente. N'hésitez pas à me contacter pour plus de renseignements !
Un tour du Soleil en duos : 6e année en cours
Pour (re)découvrir en un clin d’œil et sur une seule page les micro-histoires photographiques publiées en ces lieux virtuels :
- entre le 22/02/2010 et le 22/02/2011, voici Un tour du Soleil en duos…
Une flèche nous indique de poursuivre en empruntant l’escalier blanc. Quatre étages sont annoncés. Nous entamons la descente normalement. Enfin, comme toute descente d’escalier réalisée sans empressement ni lourdeur particulière. Après un premier étage, un bruit sourd commence à se faire entendre. Un son qui va crescendo au fur et à mesure que nous descendons […]