Photo-graphies et un peu plus…

JCF6_DSC8992-72-site

Vous propose-t-on, à vous aussi, lorsque vous naviguez sur Internet, des publicités pour des masques en tous genres, chirurgicaux, à deux plis, ffp3, antipoussière avec soupape, à visière – même teintée, pour voir la vie en rose peut-être –, ffp2, à usage unique, en tissu lavable, afnor, en tissu homologué, en wax ? Je n’ai jamais été aussi au fait de l’étendue de l’offre de masques ! Et j’imagine bientôt la récupération : « Ce masque bien sous tout rapport vous a été offert par Seforhein ! » ou « Pour deux tablettes de chocolat Côte d’Argent achetées, un masque comestible offert ! ». Je vous l’accorde, cela ne vous protègerait pas réellement – ni les autres –, mais ce serait amusant. Un peu comme de manger une glace en plein été !
Qui a salivé en pensant au chocolat ? Je vérifie simplement un point sur les neurones miroirs que j’avais mentionné il y a quelques jours ou semaines, je ne sais plus, en évoquant le bon pâté du Périgord planqué au fond de la dernière étagère de mon placard que je me ferais un plaisir d’ouvrir en rentrant. Si vous voulez tout savoir, comme le lance Sally à Harry lors de leur trajet Chicago-New York, et bien, nous l’avons ouverte. D’ailleurs, je vais me chercher un morceau de chocolat.

Ah, et sinon, je viens de visualiser le masque que pourrait proposer la marque au swoosh, la virgule à la hauteur de la bouche – pour un sourire permanent, de biais, mais sincère… je suggère, de ce fait, une mutualisation des coûts avec UltraDark – et un nouveau slogan pour l’occasion : « Just keep it! ». A ne pas confondre avec « Just skip it » – « Passez votre chemin » –, en s’associant avec une marque de lessive, qui pourrait cependant avoir du sens dans une perspective de généralisation à long terme de distanciation sociale.

A ce propos, je m’étonnais l’autre jour que mon smartphone se soit aussi rapidement adapté à la situation en me proposant d’emblée, lorsque je compose mes messages, les mots pandémie, coronavirus, confinement, autorisation spéciale d’absence, télétravail, covid-19, apocalypse, chloroquine, rapatriement, dystopie, ambassade (pas de lien de causalité entre ce mot et le précédent), lockdown (parce que j’ai pris le tic de mélanger français et anglais dans certains de mes messages… non, c’est pas vrai), déconfinement, quarantaine, masque, attestation de déplacement dérogatoire, nouvel ordre, nouveau monde, l’après… D’ailleurs, j’attends avec impatience l’édition du Petit Robert 2021 dans lequel vont certainement débarquer d’autres nouveaux mots et néologismes – dans les faits, tous ne le sont pas, mais ils prenaient sérieusement la poussière en pages 264, 517 et 810, ou alors n’étaient utilisés que par une faible proportion de la population, une niche comme on dit – nés de l’imagination et de la créativité prolifique des confinés en temps de pandémie : comorbidité, Sars-coV-2, période d’incubation, gestes barrières, Whatsappero, clapping, coronabdos, lundimanche, confifi, confiner, covidéprimer, zoomer, covidiot, désinfox, cluster, quatorzaine, immunité collective, corona-sceptique… Je ne sais pas comment cela se passe dans le monde des mots, s’ils sont tous là, à vouloir se hisser sur la couverture solide du dictionnaire en levant la première lettre, car ils sont bien élevés : « Moi ! Moi ! Moi ! Je veux me rendre utile ! Je veux aider les humains à s’exprimer de façon juste en cette période si complexe ! » « Qui es-tu toi, j’ai du mal à te lire, tu es très grand ? » lui lance le Gardien des Mots, qui décide également des entrées et des sorties. « Asymptomatique Maître ! » « Ah ! Tu as bien raison, ils vont avoir besoin de toi ! Mais souviens-toi que tu rassureras autant que tu effraieras ! Bon, tu es prêt, je te déconfine ! Va, vis et deviens ! »… Quelques heures plus tard en lançant une recherche sur le mot libéré, rayon Actus. 22400 occurrences : « L’énigme des personnes asymptomatiques », « Environ 25% des personnes infectées seraient asymptomatiques », « Ces asymptomatiques qui vous entourent », « Les personnes asymptomatiques seraient aussi contagieuses que les autres », « Quatre infections sur 5 seraient asymptomatiques selon une étude »… Ce qui, je suis d’accord, n’est pas compatible avec un titre précédent tablant plutôt sur 1 cas sur 4. Mais sommes-nous réellement à une contradiction près ?

Share on Facebook

Lorsque vous faites la queue à la caisse d’un super/hyper/méga-marché, où que vous soyez dans le monde, on continue à essayer de vous vendre des choses… La queue, c’est du temps, le temps, c’est de l’argent. CQFD. Donc, selon l’endroit, on vous met des friandises, des livres, des bons d’achats, des médicaments, des cigarettes, des revues sous les yeux et surtout, à portée de main… Il suffit de la tendre et hop, c’est dans le caddy, ni vu ni connu… Des magazines donc que certains ouvrent le samedi matin pour lire leur horoscope de la semaine suivante avant de les reposer aussitôt sur le présentoir. Vous n’y trouverez jamais Le Monde Diplomatique, Polka Magazine ou le National Geographic. En revanche, pour les derniers potins, la file d’attente est the place to be.

Vous voilà donc au premier rang d’un one mag’ show improvisé et jouissif où le ridicule ne tue pas. A l’instar de ces deux couvertures se faisant face de part et d’autre de la queue-salle de spectacle. Vous regardez à droite : « oulala, ça va mal entre Brad et Angie ! Ah bon, elle l’a trompé avec des filles ? de toute manière, un couple comme ça, ça ne peut pas durer éternellement, il n’y a que les étoiles qui ont ce privilège et encore, certaines implosent, d’autres explosent et puis, l’éternité, c’est long à la fin » et là, subrepticement, un ricanement vous incite à regarder à gauche : « Brad et Angie se marient secrètement en France, tout va bien alors, et puis, ils sourient sur la photo, c’est dire s’ils sont heureux, mais, quand même, qu’est-ce que c’est que cette histoire, je croyais qu’ils se séparaient ! ils le disent là, juste de l’autre côté… »

Là, le spectateur en train de faire la queue – n’oublions pas que c’est pour cette unique raison qu’il se trouve entre ces deux allées de magazines – ne sait plus où donner de la tête – il balaye à gauche à droite comme s’il assistait à un Match de tennis -, il ne sait plus qui croire – est-ce vraiment important ? -, il est perdu et se réconforte en attrapant une petite barre chocolatée sur le côté… Tout devient alors très subjectif et dépendant de l’humeur du jour. C’est un peu comme le verre à moitié vide ou à moitié plein. Au final, il y a la même quantité de liquide, mais tout est toujours une question de Point de vue… « Si vous préférez la version romantique, tapez 1 ; si vous préférez la version trash, tapez 2 ; sinon, avancez d’un mètre, des caissières attendent ! » Bon, évidemment, là, la presse people, ses énormités et ses paradoxes, ça saute aux yeux, car tout et son contraire existent dans le même temps, rappelant que la vérité importe bien moins que le divertissement que l’imagination ou la surinterprétation peuvent faire naître chez le lecteur-voyeur.

Mais il suffirait de se plonger dans des magazines un peu plus sérieux et de recenser, par exemple, les articles sur une période de 3, 4 ans parlant de vin – alternativement bon et mauvais pour la santé -, de régimes – manger des fruits, arrêtez les fruits ! -, des téléphones portables – dangereux, mais non pas du tout… ! – pour réaliser que les contradictions ne sont pas l’apanage de la presse à 4 sous. La comparaison est excessive, mais le résultat est le même : comment se faire une opinion juste sur les choses de la vie quand tout fluctue en permanence pour des raisons obscures ? Moralité, ne jamais tourner la tête quand vous faites la queue à la caisse ! Cela conduit beaucoup trop loin !

Share on Facebook