Photo-graphies et un peu plus…

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Ce soir, j’avais envie de me reposer sur un cliché. Ces photographies déjà vues mille fois sur le net, qui se ressemblent toutes plus ou moins, plus plus que moins, et qui ont peut-être même été à l’origine de votre voyage. Cette photo là, j’avais envie de la prendre moi aussi. De fait, en arrivant à Manarola, l’un des cinq villages du parc national des Cinque Terre, enfer estival autant que paradis hivernal (celui que j’avais choisi), j’étais tout de suite partie à sa recherche : la croix au sol indiquant où se mettre pour prendre ledit cliché. Et à vrai dire, la mission n’avait pas été si complexe : un attroupement signalait sa présence d’assez loin.

J’avais juste attendu que le soleil ne se couche, puis dore les falaises et les maisons colorées de ce village escarpé, et qu’un petit bateau sorte du port pour déclencher. D’ailleurs, même cette image-là, on la trouve par dizaines… Peu importe, le cliché, on ne se met pas de pression en le prenant, on n’a même pas à l’imaginer – d’autres l’ont fait avant soi -, on n’a pas non plus à courir bêtement derrière un monsieur sur une plage enveloppée dans la brume en croisant les doigts pour ne pas le perdre de vue ni rater la photographie que l’on vient de prévisualiser où tout est évidemment parfaitement à sa place… Ce n’est pas que l’on n’attende rien d’un cliché non plus, bien au contraire : le cliché est une respiration. Essayez donc de ne pas respirer et vous verrez que vous ne tiendrez pas longtemps…

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Et alors ?

En avoir pleinement conscience en cadrant ne m’a pas empêchée de déclencher. Sans regret d’ailleurs. Donc, oui, je contribue à véhiculer un cliché du Vietnam avec ses rivières bordées de nénuphars en fleurs serpentant autour de pics karstiques et sur lesquelles on peut naviguer, tranquillement, à bord d’embarcations à fond plat en avançant à l’aide d’une longue tige en bambou protégés du soleil par un chapeau pointu… Enfin, inutile de vous faire un dessin. C’est juste au dessus. En même temps, ce cliché-là, authentique scène de la vie courante locale, est passé sous mes yeux des dizaines de fois (oui, j’exagère un peu). Et chaque fois, j’ai été saisie par sa beauté, par sa simplicité, par sa pureté. Et puis, quand bien même, rien n’interdit au photographe de prendre des clichés, si ?

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S'envoiler

Là, ce soir, alors que l’hiver prend ses marques, assez trivialement, j’avais envie de chaleur, de lointain, de couleurs et de clichés plus vrais que nature…

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Des hauts débats

C’est un peu comme avec les blockbusters américains qui égrènent, les uns après les autres, tous les clichés des films de ce genre – au hasard, le pouvoir de l’amour, le mythe de la seconde chance, le sacrifice d’un couple de personnes âgées, la renaissance après les épreuves, la bravoure, le patriotisme, le dépassement de soi, la bannière étoilée sous toutes les coutures… – , comme si un assistant avait sa liste pré-établie et veillait à ce que toutes les lignes soient rayées à l’issue du tournage : parfois, c’est amusant d’en faire des tonnes ! Comme ici, avec ces nuages, un peu plus discrets dans le monde réel….

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360

 

Prendre un reflet en photo, c’est une manière simple de capturer un intérieur et un extérieur, c’est donc s’autoriser à ne pas choisir entre l’un ou l’autre. D’une certaine manière, c’est aussi avoir des yeux dans le dos (ou sur les côtés plutôt pour limiter les risques d’autoportrait involontaire), ce qui est physiquement impossible malgré l’expression consacrée, donc extrêmement satisfaisant. C’est un peu tricher finalement. C’est privilégier une approche globale également, certes parfois un peu confuse, plutôt qu’un point de vue unique et directif. C’est surtout choisir de créer un dialogue artificiel entre deux scènes géographiquement proches tout en étant éloignées l’une de l’autre. Comme ici, entre ces parts de pizza d’un côté, les gondoliers de l’autre, l’eau entre les deux. En somme (au sens propre comme au figuré), une certaine image de Venise, et, plus largement, de l’Italie…

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J’ai fait la maligne, il y a deux jours, avec cette histoire de pluie diluvienne à propos de laquelle j’annonçais fièrement que, non seulement, elle ne me dérangeait pas, mais qu’en plus, je lui trouvais beaucoup d’atouts ! Ma nuit passée m’oblige à revenir sur certains éléments…

Vous savez, c’est un peu quand on se dit : « Tiens, ça fait longtemps que je n’ai rien cassé ! » et que, le lendemain, on fait un faux mouvement en racontant une histoire, et que, porté par l’enthousiasme, on envoie valser un verre, qui se brise alors en mille morceaux sur le carrelage… Une partie de nous ne peut s’empêcher de se demander si le verre aurait pu être épargné si l’on n’avait pas eu cette pensée la veille. Ce soir, je me demande donc si l’inondation dont a été victime ma très charmante chambre amstellodamoise sous verrière poreuse par temps de pluie acharnée et gouttière bouchée aurait pu être évitée si j’avais écrit autre chose…

Donc, je complète mon propos : oui, j’aime les grosses pluies, mais non, je n’apprécie pas particulièrement qu’un goutte à goutte se transformant en filet d’eau continu me réveille en pleine nuit, m’obligeant à écoper, éponger, déménager… Donc, dans l’hypothèse où la fiction a une certaine prise sur la réalité, je voudrais également préciser ce soir que j’adore les vacances au soleil, même si ça fait un peu cliché !

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Je me souviens parfaitement de ma réaction en débarquant sur cette plage de Waikiki : une étrange sensation d’être entrée dans une affiche publicitaire sans m’en rendre compte… Vous savez, de celles qui, en hiver voire aux prémices d’un été nommé désir, vous narguent dans les couloirs parfois suintants et glauques du métro parisien, tel un idéal inaccessible.

Tout relève tellement du cliché – les cocotiers et leurs ombres marbrant le sable blanc et fin, l’eau turquoise où l’on s’imagine déjà voir jusqu’à ses orteils posés sur un sol vierge, le ciel bleu ponctué de nuages dessinés au pinceau, les touristes nonchalants sur leurs transats, les parasols aux couleurs vives, la blanche colombe posée sur le rocher au premier plan… – que la supercherie paraît inéluctable. Où est le directeur de la photographie, la cantine des figurants, où sont les spots lumineux, les décorateurs et filtres de couleurs ? Où est la preuve que tout ce décorum n’a été créé qu’à des fins mercantiles ? Pour vendre des bikinis, des alcools forts ou des vacances de rêve… Nulle part. Aussi artificiel qu’elle semble l’être, cette image n’est que le fruit d’une lointaine réalité. Je suis dans le rêve de quelqu’un d’autre. Et je le saurai bien assez vite…

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Quoique l’on en pense, à l’étranger, la France a conservé une certaine aura, voire une aura certaine comme diraient Dupont et Dupond (des jumeaux n’ayant pas le même nom, même à une lettre près, c’est louche…). Il n’y a qu’à observer la petite étincelle qui s’allume instantanément lorsque vous dites à un compagnon de voyage que vous venez de France. Je vous laisse alors imaginer le feu d’artifice quand vous précisez que vous venez de Paris. « Oh, Parrriiiisssseeee ! I love Parrrriiiiiisssseeeee ! » Où que vous soyez dans le monde, il y a quelqu’un qui aime, liebe, love, ama, quiérote, lonwo, iubesc… Paris ! C’est vrai, la ville lumières est une des plus belles cités au monde – un peu de chauvinisme de temps en temps ne fait pas de mal. Le cinéma et la télévision continuent d’ailleurs d’en transmettre une image romantique, magnifique, magique… Le plus étonnant est que beaucoup de ces adorateurs du bout du monde n’y ont en fait jamais mis les pieds… Paris demeure ainsi un mythe, certes un peu vieux, à leurs yeux et ils s’en accommodent très bien…  Evidemment, on se sent un peu fiers de tant de reconnaissance même si l’on n’y est pour rien et si l’on a parfaitement conscience, en tant que Parisien justement, que les clichés ne sont pas toujours les meilleurs amis des visiteurs. Ainsi le mythe s’effondre-t-il tout d’un bloc pour certains touristes passant à l’acte – venir voir d’eux-mêmes – en particulier les Japonais, à tel point qu’un nom a été donné à cette déception : « le syndrome de Paris » ou le choc du décalage entre l’image et la réalité…

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