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Comme l’aurait dit Magritte, ceci n’est pas une photo. De fait, c’est un dessin. La photo serait d’ailleurs assez difficile à réaliser, d’abord pour des questions de droits à l’image, ensuite pour des raisons purement techniques, la luminosité et le mouvement du métro n’aidant pas à composer des images nettes. Le dessin a donc ses avantages… Ceci dit, celui ci est vieux. Peut-être une décennie. Probablement dix ans exactement même car c’est à cette époque, février 2002, que Métro a été diffusé pour la première fois en France, ouvrant la porte à une nouvelle presse, gratuite pour nous tous car financée totalement par la publicité. A cette époque, comme toute nouveauté, cette presse d’un genre embryonnaire mais plein de promesses s’était attirée les foudres de la « vraie » presse, entendez « sérieuse » car « payante », mais avait rapidement trouvé son public dans les rues ou à l’entrée des bouches de métro.
A cette époque, j’avais écrit ceci : « Drôle d’image que celle que recevrait un parisien ayant hiberné plusieurs mois et refaisant surface dans le métro à l’heure de pointe. Il verrait une foule de « transportés » plongée dans la presse… Mais pas n’importe laquelle… Des feuilles de chou gratuites comme « 20 minutes » ou « Métro ». Du zapping à portée de mains… Pour ou contre, là n’est pas vraiment la question… La gratuité de l’information n’a-t-elle pas ses limites ? Chacun s’arrache son journal avant de s’engouffrer dans l’antre de la ville et, jour après jour, chacun s’imprègne des mêmes informations, des mêmes partis-pris, des mêmes idées… Or, n’est-ce pas confrontés à la diversité des points de vue que nous apprenons à développer notre esprit critique, et par la même occasion, à être moins manipulables ? »
Douze ans après donc, la presse gratuite s’est institutionnalisée, multipliée, spécialisée, parfois équilibrée… Elle est partout, fait partie du paysage et du quotidien de l’hyperactif urbain sur-sollicité qui achève sa mue en pigeon (pas au sens péjoratif du terme), contraint qu’il est de picorer ainsi ça et là de l’information (les grandes lignes suffisent à lui donner une certaine image du monde dans lequel il évolue) mais aussi le reste de sa vie… A tel point que Direct Matin du jour s’offre une pleine page d’auto-congratulation dans son propre journal (le faire dans Métro ou 20 minutes aurait certes été mal accueilli mais auraient-ils refusé un contrat publicitaire ?) pour remercier ses lecteurs car grâce à eux, il est devenu le 1er quotidien de France avec plus d’un million d’exemplaires diffusés chaque jour en 2011. Malgré les réserves que l’on peut avoir à l’égard de ces journaux – en termes de contenu -, je ne peux m’empêcher de me dire, en voyant des jeunes plongés dans le journal le matin pendant leur trajet en métropolitian, qu’ils feraient certainement autre chose s’ils avaient dû le payer. D’où cette question : une information parcellaire ne vaut-elle pas mieux que pas d’information du tout ?