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La vie se déroule globalement dans les mêmes couleurs pour tous. J’écris globalement parce que cela n’empêche pas des divergences de perception d’une couleur à l’autre entre deux personnes voire plus.
– C’est vert !
– Mais bien sûr que non, c’est bleu ! Dis lui, toi, que c’est du bleu !
– Bah moi, je trouve que c’est plutôt mauve…
Bon, là c’est assez radical et inquiétant j’en conviens mais ces choses arrivent et c’est toujours étonnant de réaliser à quel point la perception des couleurs est une affaire personnelle alors même que l’on croit que c’est universel (hors toute pathologie chromatique évidemment).
Il y a pourtant des phrases qui pourraient prêter à confusion dans ce que disent les gens et qui n’est qu’une image, une façon de parler : « je vois la vie en rose », de cette couleur rose qui symboliserait donc le bonheur ; « je broie du noir » liant cette non couleur à la dépression, tout du moins à un certain mal être ; « je suis verte » pour exprimer une déception et même « j’ai eu une peur bleue » qui pousse à se demander si une peur marron n’aurait pas été pire encore. Toujours est-il qu’en aucun cas, ceux qui sont amenés à prononcer ces phrases ne voient littéralement la vie en rose ou noir, pas plus qu’ils ne sont verts ou bleus…
Et pourtant, face à certaines scènes, confrontés à certaines ambiances, on peut parfois s’imaginer dans d’autres couleurs que celles que nous propose, je devrais dire « impose », la réalité, d’autres couleurs donc que celles que nos yeux voient au quotidien, dès lors qu’ils sont ouverts. Se projeter dans du noir et blanc est sans doute la plus simple et la plus classique des transpositions colorimétriques. Pour faire ressortir certains contrastes, certaines zones, pour amener l’œil à se concentrer sur un tout plus que sur une couleur particulière. Devant une photo en noir et blanc, personne ne trouvera bizarre que les couleurs de la réalité aient disparu alors que ce travestissement est quand même assez extraordinaire si on y réfléchit un peu.
Il y a ainsi quelque chose d’assez fascinant, je trouve, dans cette envie de changer les couleurs du réel afin qu’elles correspondent plus à l’image que l’on s’en fait. Comme avec cette photo prise à Detroit. Je suis au milieu de la route – pas de danger, les rues sont quasi-désertes – pour prendre en photo le brillant et imposant siège de General Motors, dominant une ville qui agonise partiellement. Sur cette image, celle du siège donc, ce sont bien les couleurs réelles que je vois (j’entends, même après avoir pris la photo) comme pour mieux montrer l’indécence, la brutalité du contraste entre ces tours de verre bleutées et la brique rouge alentour, les magnats des premières étant en partie responsables de la désertion des seconds.
Pourtant, en me retournant et en découvrant cette scène : la rue vide, le nuage de vapeur s’échappant des bas fonds et se tortillant comme un serpent au gré des coups de vent, l’immeuble fermé surmonté par cette calligraphie vieillotte et le type au volant de sa voiture aux formes carrées, instantanément, ce sont d’autres couleurs qui se présentent. Passées, sales, vaporeuses et dures à la fois. Des couleurs qui renvoient à une imagerie lointaine, même pas familière, de polar, de film policier stylisé, accentuant une ambiance a priori inquiétante, dans laquelle on imagine aisément que les deux malfrats dans la voiture viennent de commettre un crime (pas sanglant je précise) et qu’ils attendent que la voie soit libre pour disparaître dans la brume du sous-sol. Voilà, cette histoire-là avait ces teintes-là, quand bien même la réalité s’est révélée autrement plus douce et inoffensive…
Coup de génie – un peu limite quand même – de l’inventeur de cette attraction étonnante puisqu’il a trouvé comment faire pour que les enfants s’arrêtent de jouer sans avoir à le répéter 36 fois… Il les fait entrer dans une bulle – jusque là, tout va bien même si c’est un peu étrange -, il gonfle la bulle à l’aide d’une machine bruyante qui pulse l’air à la vitesse de la lumière – les petits sont tout ébouriffés mais ce n’est rien comparé à ce qui les attend – puis il les envoie valdinguer dans un bassin de 60 cm de profondeur (rempli d’eau bien sûr, sinon ce serait vraiment cruel). Les voilà donc à tournebouler dans leur bulle, à tenter de se redresser – en vain souvent – pour avancer, à faire des bonds sur l’eau sans se mouiller, à rire aux éclats, à s’essouffler à force de pédaler dans le vide comme des hamsters dans leur roue… Cela pourrait durer des heures ! Et c’est là que l’inventeur est brillant donc : la dose d’air qu’il envoie dans la bulle au début correspond plus ou moins – cela dépend de l’ardeur des enfants – à 15 minutes. Au-delà, après s’être ainsi dépensés, ils commencent à suffoquer, à manquer d’air, à paniquer et donc à se diriger naturellement vers la sortie ! Certes, c’est un peu radical mais c’est très efficace !
On a beau savoir que Los Angeles est une ville aux dimensions titanesques, il est difficile de se rendre réellement compte de sa démesure avant d’y mettre les pieds… Ou de la découvrir depuis les airs, de nuit de surcroit, donnant un coup de projecteur aux lumières colorées de cette cité des anges aux rues si interminables qu’elles finissent par s’évanouir dans l’obscurité.
On a l’habitude de dire « Qui se ressemble, s’assemble ! » (c’est même prouvé scientifiquement, c’est dire !) mais je ne pensais pas que cet adage était aussi un critère de choix, inconscient a priori, du banc sur lequel s’asseoir pour sa pause déjeuner. Cela ne vous échappera pas – en tout cas, cela m’a sauté aux yeux quand ils ont dérivé dans leur direction -, ces deux femmes portent des vêtements aux couleurs strictement identiques, chaussures comprises. Elles seraient en jean des pieds à la tête, comme beaucoup de gens aujourd’hui, je n’aurais même pas sorti mon appareil photo. Mais là, avouez que cette association bleu marine / vert empire n’est pas des plus fréquentes et méritait donc son déclenchement ! Le fait qu’elles se soient assises chacune à une extrémité du banc me fait penser, d’une part, qu’elles ne se connaissent pas – si c’était le cas, elles seraient plus proches l’une de l’autre et en train de disserter sur leur télépathie vestimentaire à grands coups d’éclats de rire -, et, d’autre part, qu’elles ne se sont pas regardées du tout avant de s’asseoir – sinon, l’une au moins aurait opté pour un autre siège en remarquant cette étrangeté… Il s’agit donc là d’une extraordinaire coïncidence comme on en croise peu, de celles qui chatouillent toujours un peu l’imaginaire…
Il est des moments, comme celui-ci, où les spectacles en plein air perdent indubitablement de leur intérêt.
Je n’aime pas toujours les enfants – par exemple, je n’aime pas quand ils crient, chouinent, pleurnichent alors que j’essaye d’avoir une discussion suivie et sérieuse avec quelqu’un, ni qu’ils posent 36 fois la même question à leurs parents sans se fatiguer et avec toujours ce même air innocent (que quelqu’un leur réponde s’il-vous-plaît !), ou encore qu’ils donnent l’impression à tous ceux qui les approchent de devoir mettre leur vie entre parenthèse pour ne s’occuper que d’eux d’eux d’eux. Oui, oui, je sais, « un enfant, malgré tout, c’est tellement de bonheur » ! Bref.
Je n’aime pas toujours les enfants donc mais il est des circonstances où, malgré tout, je les aime toujours. C’est lorsque, avec une simple question posée bien évidemment en toute innocence, ils réussissent à mettre en défaut tous les adultes en présence, les laissant coi avec leur ignorance de grand sensé tout savoir ! Cela s’est produit pas plus tard que la dernière fois. Un bout de marmaille s’est posté devant un de ces Gulliver et lui a lancé : « Pourquoi, quand on se chatouille soi-même, on ne rigole pas ? » Première étape pour le grand : comprendre la question et vérifier qu’elle a un sens. Deuxième étape : visualiser l’action et réaliser, peut-être pour la première fois, qu’effectivement, se chatouiller soi-même ne produit pas du tout le même effet ! Cela n’en produit d’ailleurs aucun.
Le minot, patient, le regarde avec des yeux de chouette sur laquelle on aurait braqué une lampe torche. Troisième étape : trouver une réponse, une réponse, réponse… Les pupilles du grand se dilatent : il croit tenir son explication. « C’est parce qu’en se chatouillant soi-même, on anticipe le geste et du coup, on ne peut plus rire » se dit-il intérieurement. Il s’apprête alors à livrer sa théorie à la marmaille, il articule la première syllabe avant de ravaler sa phrase : il vient de comprendre que son explication ne tenait pas une seconde. Quand une personne s’approche pour nous chatouiller, le fait de la voir et de savoir ce qu’elle va faire ne nous empêche absolument pas d’éclater de rire, éventuellement de nous tordre par terre à en perdre notre souffle. L’anticipation n’est donc pas le facteur discriminant. Alors l’autre, incapable d’avouer qu’il n’en a fichtre aucune idée, regarde le petit et lui dit : « Elle est nulle ta question ! ». Et là, ce sont les adultes que je n’aime pas toujours…
Lorsque j’ai aperçu ces minuscules billes de poussière révélées et colorisées par une lumière du soleil passe-muraille ayant réussi à se faufiler dans l’interstice de cette sacrée façade de pierres, j’ai immédiatement pensé à mes lectures de jeunesse. A une phrase en particulier. « Nous sommes tous des poussières d’étoiles. » L’accent québécois d’Hubert Reeves en prime, l’astrophysicien qui a sûrement le plus contribué à démocratiser une matière autant complexe que point de départ des plus belles histoires… En pleine phase « D’où venons-nous ? », j’ai tout de suite adopté cette assertion scientifico-poétique qui nous annonçait, en substance, que nous, êtres humains, combinaison fantastique d’atomes crochus, étions à la fois tout et rien, infiniment grands et ridiculement petits, les résidus éparpillés puis réordonnés de ces étoiles gigantesques ayant peuplé un univers déjà incommensurable il y a des milliards d’années. Un pedigree mythique qui nous unit tous alors que nous sommes tous différents et séparés. Qui force à l’humilité aussi tout en nous couvrant d’une certaine aura…
… mènent à elle. Temporairement. 5 Share on Facebook
Share on Facebook– J’ai repéré un coin en contrebas. Je vais y faire quelques photos, j’en ai pour 10-15 minutes. 20 maximum… Tu viens ? – Non, non, vas-y, je préfère rester lire dans la voiture. Du temps passe… Beaucoup de temps… Trop de temps… Moralité : ne jamais croire un photographe annonçant qu’il n’en a pas pour longtemps ! […]
Share on FacebookSe promener dans les rues du Amsterdam historique peut donner l’étrange impression d’avoir franchi une frontière fictionnelle et régressive, et de débarquer au beau milieu d’un dessin d’enfant. Ceux-là même qui squattent impunément nos portes de frigidaires, nos murs mitoyens au bureau voire, au bout d’un certain temps, nos fonds de tiroir. Les murs des […]
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