Photo-graphies et un peu plus…

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J’ai fait la maligne, il y a deux jours, avec cette histoire de pluie diluvienne à propos de laquelle j’annonçais fièrement que, non seulement, elle ne me dérangeait pas, mais qu’en plus, je lui trouvais beaucoup d’atouts ! Ma nuit passée m’oblige à revenir sur certains éléments…

Vous savez, c’est un peu quand on se dit : « Tiens, ça fait longtemps que je n’ai rien cassé ! » et que, le lendemain, on fait un faux mouvement en racontant une histoire, et que, porté par l’enthousiasme, on envoie valser un verre, qui se brise alors en mille morceaux sur le carrelage… Une partie de nous ne peut s’empêcher de se demander si le verre aurait pu être épargné si l’on n’avait pas eu cette pensée la veille. Ce soir, je me demande donc si l’inondation dont a été victime ma très charmante chambre amstellodamoise sous verrière poreuse par temps de pluie acharnée et gouttière bouchée aurait pu être évitée si j’avais écrit autre chose…

Donc, je complète mon propos : oui, j’aime les grosses pluies, mais non, je n’apprécie pas particulièrement qu’un goutte à goutte se transformant en filet d’eau continu me réveille en pleine nuit, m’obligeant à écoper, éponger, déménager… Donc, dans l’hypothèse où la fiction a une certaine prise sur la réalité, je voudrais également préciser ce soir que j’adore les vacances au soleil, même si ça fait un peu cliché !

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En temps normal, je n’apprécie guère être surprise par la pluie. Enfin, tout dépend du type de pluie… S’il en est une qui m’insupporte particulièrement – si je puis être tout à fait franche avec vous -, c’est bien le crachin. À mes yeux, un crachin, c’est un nuage qui n’a pas réussi à choisir entre s’abstenir et se manifester réellement. Un crachin, c’est une pluie qui fait du chichi ! Un crachin me donne la bizarre impression d’avoir un Brumisateur braqué sur moi en continu, ce qui peut être très appréciable et apprécié en été lorsqu’il fait 38°C mais pas en hiver, après plus de deux vaporisations, sous un ciel gris-blanc lui-même indécis. Le crachin, avec ses minuscules gouttelettes d’eau est surtout un calvaire pour les porteurs de lunettes non équipées d’essuie-verres, c’est-à-dire toutes ! Leur diamètre est si petit et leur concentration si élevée que leur présence occulte rapidement les verres, obligeant les bigleux à transformer leurs index en cet outil rêvé au risque de paraître ridicule ou à remiser leurs binocles pour poursuive à l’aveugle, dans la limite des dioptries disponibles…

À l’inverse, je suis une grande fan des déluges, des trombes d’eau, des cascades, en somme, des pluies bien sûres d’elles, voire passablement énervées, bien décidées à livrer tout ce qu’elles ont sur le nuage. Vêtue de façon adéquate ou pas – donc, protégée ou trempée jusqu’aux os -, peu importe, cette pluie-là me plaît. Ce qui me plaît ? Le claquement sec des grosses gouttes sur le sol ou tout autre élément intermédiaire ; la panique qui s’empare des piétons, courant dans toutes les directions en quête d’une place au sec comme des fourmis sur lesquelles on soufflerait ; le rid’eau qui se forme devant soi et métamorphosant la ville en d’éphémères lavis ; l’embarras des automobilistes ralentis pas le manque de visibilité, les martèlements répétés des gouttes sur leurs carcasses de métal, les yeux grands ouverts, les phares allumés ; les rigoles se transformant en torrents idéaux pour une session mémorable de canyoning ; le sentiment que quelque chose nous échappe et nous dépasse totalement, que le ciel nous tombe sur la tête ; cette autre vie qui se crée où la nature tumultueuse se manifeste, prend le dessus et nous rappelle qui est le plus fort…

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C’est un fa, j’aime travailler en musique. Ne pas être en mesure d’en écouter dans ce contexte studieux est même susceptible de me perturber. Souvent, je suis du genre mélomane monomaniaque. A écouter le même album en boucle pendant des semaines jusqu’à en connaître par cœur les notes, les transitions, les rythmes et les mots, comme si je me préparais à réciter une poésie. Je sais, à chaque nouvelle seconde qui passe, quel son va résonner à la suivante. Il n’y a pas vraiment de surprise, ce qui a quelque chose de rassurant, de réconfortant, d’efficace. Dans la vie, ne fonctionnons-nous pas un peu comme cela aussi ? En allant finalement toujours dans les mêmes quartiers, en empruntant à peu près les mêmes chemins pour y aller, en ingurgitant régulièrement les mêmes menus… D’agréables petites habitudes qui, progressivement, se muent en routine.

A l’inverse, j’aime tout autant l’expectative dans laquelle me plonge le mode aléatoire, ce fameux shuffle auquel Monsieur Lazhar n’entend rien dans le film éponyme, et ce, malgré son nom qui lui fait écho. Avec le shuffle, tout d’un coup, des pistes oubliées remontent à la surface, ressuscitées ; d’autres, ignorées, se font connaître ! Le requiem de Mozart côtoie le râle d’Eminem, les chants diphoniques d’Huun-Huur-Tu les vocalises de Björk, sans que quiconque ne crie au scandale, sans que cela soit une aberration musicale, sans que cela n’altère l’attention malgré les divergences de tempo, de voix, d’ambiances… Le hasard crée sa propre polyphonie et s’avère être un DJ plutôt avisé.

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Au départ, c’est le bruit qui attire. Celui de cris, répétés, aigus, empressés. Celui de la sortie de bain précipitée des mouettes du secteur, de leurs paires d’ailes battant frénétiquement l’air au risque de s’entrechoquer. De leurs déplacements coordonnés mais bizarrement anarchiques vers un point convergeant rapidement identifié : un buffet garni, gratuit, mais quantitativement limité, vient d’ouvrir. En l’état : des maquereaux frais. Le luxe, quotidien, à portée de bec ! Mais pas pour tous les piafs, même si tous tentent de s’en approcher… En lieu et place du civisme, de la générosité et du sens du partage que ces ailés faussement affamés et pas assez prompts espèrent, les plus viles stratégies se mettent rapidement en place pour récupérer un morceau de poisson ingurgité, régurgité, déchiqueté, partagé, explosé, disséminé. Coups d’ailes, coups de becs, prises d’assaut, squattage intempestif, oubliées les bonnes manières, les salamalecs et la solidarité aviaire, quand le maquereau arrive, c’est chacun pour soi ! Ce soir, j’étais à un vernissage, avec discours et petits fours. J’ai bien l’impression qu’il y avait des mouettes aussi…

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