Photo-graphies et un peu plus…

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C’est fou tout ce qu’il peut se produire en une journée ! Je l’écris tout de suite et remonterai le temps aussitôt pour commencer par le commencement : notre petit-déjeuner à l’auberge, à 9h27. Donc, tôt dans l’après-midi, Jacinda Ardern, la Première Ministre, a annoncé le passage immédiat de la Nouvelle-Zélande au stade 3 et, dès mercredi, au stade 4. A savoir un confinement direct de 4 semaines. Voilà, c’est écrit.

Maintenant, flash-back. De la confiture de fraises sur mes tartines, un café et des céréales. A ma droite, Jay est revenu sur Terre. Et le retour est rude. Il a achevé hier la traversée de l’île du Nord à pieds, soit 1 600 km en 2 mois et 4 jours (il avait parcouru les 1 400 km de l’île du Sud il y a 2 ans). Vous auriez vu ses yeux pétillants de bonheur et d’émotion hier soir ! De la beauté pure au milieu de ce chaos mondial ! Pour rester concentré sur son objectif, il n’a pas voulu se laisser polluer par le coronavirus. Ce matin, les yeux rivés à son téléphone, il est comme ses voisins à sonder comment rentrer en Europe, le tout avec beaucoup de philosophie cependant – le plus important étant ce qu’il vient de vivre…

Louise – une française arrivée il y a 2 semaines avec un WHV*, c’est-à-dire avant que tout ne prenne une nouvelle tournure – se prépare à aller à l’Ambassade de France où elle espère trouver des réponses. Même plus que des réponses, une solution pour rentrer. Je ne sais combien il y a de Français actuellement en Nouvelle-Zélande, mais les messages de personnes dans des situations plus ou moins complexes et ubuesques se multiplient sur les réseaux sociaux et IRL, id estles cuisines et salons des auberges de jeunesse. Des jeunes n’ayant pas les ressources financières pour rester alors que les emplois diminuent de jour en jour. D’autres, ayant déjà déboursé des milliers d’euros pour racheter un billet d’avion, finalement annulé et non remboursable… Certains, dans l’impossibilité de vendre leur van puisqu’il n’y a plus de nouveaux entrants et donc pas de monnaie d’échanger pour acheter un éventuel vol retour… Nous nous rendons nous aussi à l’Ambassade. Non que nous voulions rentrer à tout prix mais nous voulons faire les choses correctement auprès de l’immigration. Un groupe d’une quinzaine de personnes est en bas de l’immeuble. Louise nous apprend qu’onne veut pas les laisser monter. Au bout de quelques minutes, un homme travaillant au rez-de-chaussée nous explique que nous ne pouvons pas rester… Personne ne bouge. Persuadée que nous n’aurons pas de réponse ici, nous filons vers ce que nous pensons être des bureaux physiques du service de l’immigration, à quelques rues de l’Ambassade. Mais ce ne sont que des bureaux. Toujours chargées – nous migrons vers l’appartement que nous allons louer le temps que cela se calme -, nous poursuivons notre chemin dans cette ville qui nous plaît et dans laquelle nous nous faufilons déjà avec une certaine aisance… L’heure est encore à l’insouciance modérée (je me lave quand même les mains bien plus souvent que d’habitude, même si je suis allée à bonne école – une mère infirmière – et que je m’y applique très régulièrement sans la pression du corona (ah ah).

Et puis là, après des détours, un passage à la librairie pour voir s’ils ont le livre de Mia Farlane, Footnotes to sex, et quelques photos, au beau milieu d’un carrefour, nous nous retrouvons nez à nez avec une famille française rencontrée il y a quelques semaines à Kaikoura, sur l’île du sud, et avec laquelle nous avions échangé. Eux-mêmes se retrouvent là après quelques circonvolutions inutiles. C’est inouï, le monde est tellement petit parfois – nous le vivons certes d’une autre manière en ce moment, mais quand même… Elle est étrange, cette joie inédite ressentie en rencontrant des camarades de galère ! Ils viennent de se faire gentiment mettre à la porte d’un Flight Center où ils venaient de trouver des billets d’avion retour pour le 1eravril (c’est-à-dire, avec une probabilité d’annulation élevée) sans trop savoir s’ils devaient rester, partir, rester, partir… Leur situation est encore différente : ils ont fait un échange de maison avec une famille néo-zélandaise, qui, compte tenu de la situation en France, retourne chez elle et veut donc récupérer sa maison, alors que la réciproque n’est pas possible. C’est une autre forme d’angoisse, surtout avec deux jeunes enfants. Mais cette rencontre inopinée, et heureuse, vient s’ajouter à ma liste de coïncidences me faisant de plus en plus croire que le hasard n’existe pas. Un couple – de Français, mais ai-je encore besoin de le préciser ? – rejoint notre discussion sur le bout de trottoir… Nous sommes désormais 8 à le partager. Dans quelques heures, ce regroupement sera interdit… Ils étaient à l’Ambassade d’où quelqu’un est finalement descendu car les personnes du rez-de-chaussée menaçaient d’appeler la police afin de déloger le groupuscule de français révolutionnaires… Ils « travaillent » à trouver des solutions nous relaient-ils, créent un formulaire en ligne pour recenser les personnes voulant rentrer en France, mais n’ont pas de solutions d’hébergement à proposer à ceux qui sont dans une situation délicate autre que le site sosuntoit.fr de solidarité entre Français à l’étranger, mais malheureusement saturé de demandes en Nouvelle-Zélande… Chacun finit par partir dans la direction qu’il doit suivre à court terme, non sans un échange préalable de coordonnées.

De notre côté, nous arrivons à notre refuge. Nous nous installons tranquillement, savourons la chance que nous avons d’être là puis déjeunons en écoutant le point quotidien du gouvernement annonçant les nouveaux cas du jour. Vers 14h20, nous rassemblons nos sacs, vides, pour aller faire des courses. C’est à ce moment que je découvre le message de Louise, envoyé 40 minutes plus tôt, nous apprenant que la Nouvelle-Zélande passe au stade 3 – immédiatement – puis au confinement – sous 48h. Avant-hier, nous n’en étions qu’au stade 2… La semaine dernière, nous randonnions près d’un glacier. Comment les choses peuvent-elles aller aussi vite ? Le Ministre de la Santé a annoncé l’existence de 102 cas confirmés lors de sa communication, dont deux pour lesquels l’origine de la transmission n’a pu être retracée avec certitude. Ce sont ces deux cas qui ont tout précipité car potentiellement des cas de transmission communautaire, donc hors des espaces où sont confinées les 100 autres personnes (si j’ai bien compris), donc la preuve que le virus circule peut-être dans le pays. La suite, vous la connaissez… La décision de Jacinda Ardner est d’ailleurs largement saluée. Mais nous parlerons politique plus tard (ou pas). Là, il devient urgent d’aller faire quelques courses. Nous n’avons plus rien à manger. Direction le New World. Ce nom n’offre-t-il pas des perspectives plus réjouissantes qu’un Auchan, Carrefour ou Leclerc ? Quand nous sommes arrivées à Auckland en janvier, j’avais pris une photo de l’enseigne seule avec le ciel me disant que cela pourrait toujours servir… Voilà… Une petite queue est déjà formée, on nous fait entrer au compte-goutte, dès qu’un client sort. Evidemment, c’est très étrange et décontenançant de passer, en un si court laps de temps, d’une vie quasi normale à une vie ainsi régulée. C’est notre tour. A l’intérieur du Nouveau Monde donc, tout le monde est calme. Fait ses emplettes sans empressement. Des petites mains s’affairent à remplir les rayons en continu, de telle sorte, qu’hormis le gel hydro-alcoolique en rupture de stock dans tout le pays, il ne manque rien. La PM a d’ailleurs rappelé plus tôt qu’il fallait faire ses courses normalement, qu’il ne fallait pas s’inquiéter, que tout était bien organisé. Et Jacinda Ardner, on la croit sur parole. Alors, nous faisons nos courses normalement, comme si nous étions chez nous. A ce détail près qu’il n’y a pas de Floraline ici, et que, pour moi, tant qu’il y a de la Floraline, tout va. Nous ferons donc sans et tout ira quand même.

Sur le retour, nous sentons bien que quelque chose a changé dans l’atmosphère. Ce ne sont pas seulement les embouteillages, plutôt étonnants à cette heure, mais aussi la façon dont les gens s’affairent, se regardent. Ceci dit, il en est autant qui semblent poursuivre leur route comme s’ils ne savaient pas ou que cela ne changeait rien. Nous voyons ce que nous voulons voir… Voilà, nous arrivons à notre refuge – je vais continuer à l’appeler ainsi, car c’est ce qu’il est devenu… encore plus à l’heure tardive à laquelle j’écris ces mots où un déluge s’abat sur la ville. Demain, dernier jour avant le confinement, il serait opportun que nous nous achetions chacune un pull avant que les boutiques de vêtement ne soient jugées inutiles, c’est-à-dire, après demain. Nous sommes parties avec peu de vêtements et plutôt des vêtements légers. Or, l’automne est clairement là dans ce monde à l’envers et, bientôt confinées, nous aurons besoin de chaleur…  Pas que humaine.

* Working Holiday Visa (PVT = Programme Vacances Travail en français)

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Suite à l’ascenseur émotionnel d’hier, bien géré cependant, et une arrivée nocturne mais réconfortante à Wellington, aujourd’hui dimanche, c’est relâche ! Après avoir bavardé avec quelques voyageurs plus ou moins anxieux à l’auberge, nous décidons de ne pas nous poser de questions – ce qui est plutôt une bonne chose et un vrai défi – et de laisser passer la journée tranquillement. D’autant que, de toute évidence, elle ne nous apportera pas plus de réponses. Pour l’heure, le seul fait d’être sur l’Ile du Nord, et en particulier à Wellington, la capitale, nous suffit et nous rassure (non que nous soyons inquiètes). Cela peut en effet être utile de n’être plus qu’à quelques minutes de marche de l’Ambassade, du Service d’immigration, des bureaux de compagnies aériennes, versus de vaines heures d’attente au téléphone, des dizaines de kilomètres et un Détroit à passer.

Voici donc les faits : nous sommes le 22 mars et en Nouvelle Zélande depuis le 10 janvier ; notre vol pour Paris via Singapour, initialement prévu le 30 mars après un premier changement, est annulé ; les alternatives n’existent quasiment plus – l’Australie accepte encore 2 jours les transits de moins de 8h dans sa zone internationale et ensuite, ferme tout – ; les cas augmentent en Nouvelle Zélande – 67 désormais ; il est recommandé aux Français en voyage de rentrer au pays – vos récits et les prévisions pour les prochains jours / semaines ne donnent pas vraiment envie d’insister et puis, techniquement, l’étau se resserre – mais à ceux qui le peuvent de rester ici – on parle d’interruption des vols jusqu’au 30 juin a minima. Tout cela sera encore d’actualité demain car, pour une fois depuis plusieurs jours, nous avons la sensation que le temps s’est arrêté et nous offre un peu de répit pour respirer. A moins que cela ne soit notre posture vis-à-vis des événements qui évolue…

Ceci dit, nous nous extrayons quand même de notre chambre dans l’après-midi pour tâter le pouls de la ville et récupérer la clé de l’appartement où, peut-être, nous devrons séjourner plus longtemps que prévu. Le soleil est au rendez-vous, nous avançons de façon presque insouciante. En février, lorsque nous avions découvert Wellington, les rues étaient très animées. Enfin, au moins jusqu’à 18h, heure à laquelle presque tous les commerces ferment en Nouvelle-Zélande. Voilà qui nous a décontenancées plus d’une fois d’ailleurs mais garantit, a priori, une vie extra-professionnelle plus riche et équilibrée. Aujourd’hui, les rues sont quasi désertes, tout comme les quais, nombre bars et restaurants sont fermés, les musées aussi… Le confinement n’a pourtant pas été proclamé. Seulement, les gens semblent avoir bien intégré le conseil simple donné par le gouvernement : « rester chez vous ». Nous nous disons, naïvement croyez-vous ?, que, même si le virus continue à se développer ici – ce qu’il fera assurément -, la gestion de la crise sera peut-être plus proche de ce qui a été mis en œuvre, avec succès, à Taïwan, Hong Kong ou en Corée du sud, que dans les pays latins…

En fin de journée, avant de regagner notre chambre à l’auberge de jeunesse, nous faisons une incursion dans la forêt toute proche de notre futur refuge. Histoire de prendre le vert et de humer les essences purificatrices des eucalyptus qui nous accompagnent discrètement depuis notre arrivée sur ces îles. Chaque chose en son temps. Demain arrivera bien assez vite !

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Ce qui s’est passé aujourd’hui vient parfaitement confirmer ce que j’écrivais hier… Ne pas se projeter ! Même à un jour… Nous venons d’arriver à Wellington. Avec 3 jours d’avance donc.

En fin de matinée, après avoir à nouveau parcouru les différents sites officiels (Ambassade de France en Nouvelle Zélande, Immigration, Gouvernement, compagnies aériennes, compagnie du ferry…) et continué à lire les récits de Français tentant, en vain ou à grands coûts, de s’envoler vers des cieux moins cléments mais hexagonaux par les rares voies aériennes encore ouvertes – et où ce sont finalement les mêmes informations qui s’échangent sans que l’on puisse réellement s’empêcher de les lire une énième fois -, nous avons préféré retourner plus rapidement sur l’île du Nord.

Deux éléments déclencheurs à ce twist final : un post évoquant des « rumeurs » de cessation des traversées du ferry entre les deux îles – ce qui compliquerait quand même un chouia la situation – et le discours – quotidien – de la Première Ministre à 12h n’annonçant rien de nouveau mais rappelant que tout pouvait changer du jour au lendemain. Après avoir décidé que le temps de l’errance était vraisemblablement terminé, il nous a fallu quelques minutes de plus pour acheter deux billets pour le dernier ferry du jour – demain, c’était complet et après-demain, un futur trop lointain -, réserver deux nuits à Wellington – et recevoir dans la foulée un mail de l’auberge prévenant qu’elle n’acceptait pas les personnes en quatorzaine -, appeler l’auberge où nous devions passer les deux prochaines nuits pour annuler – comme partout dans le monde, les acteurs du tourisme sont très touchés -, tout mettre dans la voiture – en vrac, nous rangerons plus tard -, puis parcourir les 134 kilomètres – un peu moins de 2h – qui nous séparent de Picton, d’où part le bateau et où nous devons être à 17h40 au plus tard, après avoir, bien sûr, rendu, par anticipation, la voiture au loueur… Ces circonstances exceptionnelles obligent à penser et à agir vite et efficacement. Fort heureusement, nous sommes en phase sur la marche à suivre. Nous quittons donc Nelson comme si nous fuyions une tornade imminente… C’est très étrange de finir ce voyage ainsi.

Nous arrivons en avance au Terminal du ferry. Avec deux sacs à dos de 50 l, un autre de 30 l, deux duvets, une tente et des petits sacs satellites de victuailles et autres ingrédients du quotidien du voyageur autonome. En récupérant nos billets, on nous dit que nous aurons presque le ferry pour nous toutes seules – c’est le milieu du week-end, il est tard, les néo-zélandais préfèrent la lumière du jour. Et pourtant, quand deux personnes – des Françaises dont l’une a réussi à trouver un vol après-demain à Auckland (11h de bus depuis Wellington) pour la Polynésie, où elle vit – se présentent pour acheter un billet, on leur explique qu’il y a de nouvelles restrictions et qu’on ne peut plus leur en vendre. Il leur faudra presque aller jusqu’aux larmes – non feintes – pour obtenir le précieux sésame malgré tout. Cet épisode délicat nous confirme toutefois que nous avons probablement bien fait de nous hâter…

A bord du ferry, il n’y a effectivement pas la foule de l’aller. On ne peut plus payer en cash – pour ne pas faire circuler de pièces -, des agents s’activent à désinfecter en continu les rambardes, fauteuils, tables… Quelques personnes portent des masques, d’autres toussent, certains vont se mettre à l’abri sur les ponts balayés par les vents. Sans être lourde, l’atmosphère est chargée. Comme à l’auberge hier soir ou ce matin. Chacun plongé dans ses questionnements et doutes. Car si, sur nos écrans tactiles, nous voyons défiler la vie de personnes confinées chez elles, ici, la configuration est diamétralement opposée puisque nous sommes tous loin de chez nous.

Je sors prendre l’air et quelques photos. Je sors aussi pour saluer l’île, dont les côtes peuvent être visibles depuis l’île du nord par temps clair. Un rien nous sépare, mais le rien fait parfois une grande différence…

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Aujourd’hui, nous avons parcouru 222 km. A longer les belles, verdoyantes et sinueuses Buller Gorge, celles-là même qui nous ont fait basculer de la West Coast à Tasman. La fin de ce voyage-là se profile. Dans trois jours, nous rendrons notre Toyota Corolla, nous nous hisserons sur le pont supérieur de l’Interislander pour dire au-revoir à cette île du sud sauvage et enchanteresse qui nous a tant émerveillées, et traverserons le Détroit de Cook pour rejoindre Wellington, la capitale, où la suite devrait être fixée. Ceci dit, ne nous projetons pas trop, nous avons vu ces derniers jours que cela n’était pas toujours pertinent et que la réalité était, pour une fois, plus rapide que l’imagination…

D’ailleurs, et c’est certainement le cas pour beaucoup, entre deux randonnées en pleine nature, tous les scenarii de films et romans d’anticipation apocalyptiques, post-apocalyptiques, de virus, de zombies nous reviennent à l’esprit comme un boomerang bien maîtrisé. Nous en parlons avec détachement et amusement en plein jour, tant et si bien qu’au petit matin, nous oublions presque que tout cela est bien réel. L’update se fait rapidement, et avec lui, les questions en suspens remontent à la surface. Notre réalité pourrait-elle rejoindre ces fictions-là ? Et puis, à une échelle plus individuelle : qu’allons-nous pouvoir faire ? Géographiquement parlant, j’entends. Partir, rester ? Ce n’est toujours pas réglé. Ce n’est pas une angoisse non plus. Juste une incertitude parmi d’autres.

Quoi qu’il en soit, souvent, en sillonnant cette île, avant même que le virus ne vienne occuper une partie de nos pensées et discussions, nous avons eu le sentiment d’être au bout du monde, ou plutôt à la fin du monde, ou peut-être après le monde. Voyez un peu… L’île du Sud, c’est 1 135 500 personnes (chiffre 2018) vivant sur un territoire d’un peu moins d’un quart de la France soit 7,5 habitants au km2… Combien de kilomètres avons-nous parcouru sans apercevoir âme qui vive hormis des vaches et des moutons ? A n’entendre que le chant des oiseaux ? Combien de bâtisses effondrées sur les bas côtés ? De villages à moitié abandonnés ? D’habitats bricolés, rafistolés, rouillés, comme s’ils avaient été érigés après la grande vague, à partir de ce qui avait résisté… Comme si, sans le savoir, nous avions déjà traversé un futur potentiel.

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Hokitika ! Le nom de certains sites et villes néo-zélandaises résonne comme des gouttes de pluie sur un tambour… Je suis à Hokitika, petite ville de la côte ouest de l’île du sud quand le confinement débute en France. A admirer le coucher de soleil sur la Mer de Tasman. J’ai beau être sur une île, je n’en ai pas vu tant que cela depuis mon arrivée et cela me manquait.

Je dois admettre que celui-ci a une saveur particulière.  Impossible de ne pas penser à tous ceux – en particulier, famille et amis – qui, en quelques heures, ont perdu la possibilité de se déplacer librement. Je pense à eux, je pense à vous, en nous regardant, nous, de ce côté du monde, libres, face à l’immensité de la mer, observer, sans oser tourner la tête une seconde de peur d’en rater un bout, la descente inéluctable et imperturbable de l’astre du jour sur l’horizon. J’ai l’impression que, ce soir, nous le regardons différemment, ce petit cercle jaune. Avec une joie, un émerveillement, une gratitude décuplés, mais aussi une pointe de nostalgie, de mélancolie – beaucoup de ces silhouettes anonymes sont des voyageurs de passage. Avec cette conscience aiguë et peut-être nouvelle que tout peut basculer du jour au lendemain. Que tout a déjà basculé, ailleurs. Qu’ici, ce n’est peut-être qu’une question de temps. Ou pas. On ne sait pas. On  ne peut pas savoir. On ne peut pas pré-voir. Reste que, dans ce nouveau monde plein d’incertitudes, il est rassurant de savoir que, quoi qu’il se passe, le soleil se couche et se lève, même si on ne le voit pas toujours…

Sinon, la Nouvelle Zélande vient de fermer ses frontières à tous les étrangers.

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