Photo-graphies et un peu plus…

La météo et la politique sont deux sujets que l’on peut sortir de son bonnet lorsque le blanc s’installe dans une conversation à plusieurs, à tel point qu’il en devient gênant. Plus rien à se dire. Chacun se tortille intérieurement pour trouver le sujet qui relancera l’échange, tout en essayant de repousser au maximum le joker météo (on le garde en dernier recours, car il marche à tous les coups). La thématique politique est tout aussi efficace, encore plus lorsque les avis des personnes en présence divergent. Dans un tel cas, votre soirée, que vous pensiez ratée, est sauvée, mais pas forcément l’amitié qui vous unissait à vos voisins de table ! De fait, la météo est bien plus consensuelle. Evidemment, l’on pourrait aussi imaginer quelque chose du genre :

A : Ah non, je ne suis absolument pas d’accord avec toi ! Cette pluie était totalement malvenue !

B : Mais tu racontes n’importe quoi, une fois de plus. Si tu voyais un peu plus loin que ta petite personne, tu verrais, que comme nous tous autour de cette table, cette pluie est, en vérité, la meilleure solution pour tous dans la situation désastreuse dans laquelle nous nous trouvons !

C : Euh, moi, je ne pense pas ça non plus…

B : Comment ? T’es avec lui alors ? Vous êtes vraiment tous des égoïstes ! Vous n’avez rien compris ! Donc, encore une fois, ça devient lassant à la fin, je vous explique…

C : Bah non, je ne pense pas comme lui non plus !

B : Et ben voyons ! Alors, quel est ton avis sur cette pluie ?

C : Je n’en ai pas. Je m’en moque totalement de cette pluie ! J’ai autre chose à penser dans ma vie !

B : Je n’y crois pas ! Il y a des hommes et des femmes qui se sont battus des années pour que nous ayons le droit de dire ce que nous pensons sur la pluie, et toi, comme ça, tu t’en moques totalement ? Pfff… Je ne sais pas ce que je fais là, vraiment…

Bon, ce serait amusant… Du coup, je me sens obligée de parler météo. Non parce que je n’ai rien à écrire (loin de là), ni pour lancer une nouvelle polémique, mais parce que c’est de circonstance. Il neige. Sans discontinu depuis plusieurs heures. Des flocons magnifiques qui brillent comme des diamants que je ne convoite pas ; qui, propulsés par le vent, scintillent comme des étoiles filantes. Montréal essuie, en ce moment même, sa première petite tempête de neige. C’est-à-dire qu’il n’y a que 50 cm de neige dans les rues. Dans un tel pays, la discussion météo a probablement un vrai rôle social. Dans un pays où à 00h34, des voisins raclent la neige sur leur terrasse, elle n’est sûrement pas un sujet pour combler la neige, euh, les blancs, mais un sujet en soi, de partage d’un rendez-vous annuel à la fois magique et sûrement éprouvant aussi ! Enfin, nous verrons de quoi nous parlerons demain…

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… des dessous d’autoroutes ! J’ai présenté cette photo au concours Metro Global Challenge, dans la catégorie « Trajet quotidien », quand bien même je ne suis passée par là qu’une seule fois dans ma vie. Bref, sur les 18 photos soumises au vote d’un très large public, celle-ci n’a recueilli qu’une seule voix. Et c’est la mienne ! J’ai eu pitié, trouvant cette mise à l’écart proprement injuste. Comme j’aime cette image, sa dualité clair/obscur, la percée du soleil venant éclairer les dessous volontiers sombres et glauques de cette autoroute décadente, les silos blancs sur le côté au relief rehaussé par la lumière basse, il me tenait à cœur de lui rendre hommage. Et à travers elle, à toutes ces zones industrielles, de passage ou en friche délaissées par les regards…

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Qui ne s’est jamais posté derrière sa fenêtre pour regarder choir la pluie, laissant couler le temps avec ? Qui ne s’est jamais étonné d’apercevoir le monde renversé par l’entremise des  gouttes-loupes ? Ou émerveillé en observant l’astre brillant à travers elles ? Qui n’a jamais suivi du regard ces gouttes s’écrasant sur une vitre, imaginant qu’elles faisaient la course dès lors qu’elles atteignaient la dite surface lisse, alors transformée en piste « eautomobile » ? Qui n’en a jamais alors choisi une en plaçant un espoir sérieux dans sa capacité à atteindre la ligne d’arrivée en premier, emportée par son poids, le vent ou toute autre force mystérieuse ? Qui n’a jamais tenté d’anticiper la route qu’allaient emprunter ces petites boules d’eau, les croisements de sillons, les fusions ou au contraire, les scissions, se laissant aller à un parallèle assez trivial avec sa propre vie et les rencontres qui la ponctuent… Là, on dirait une fracture. Fenêtre scindée en deux par cette faille sans faille, tracée par une lourde goutte suffisamment chargée en énergie pour aller droit au but.

Mélancolique assurément, réjouissante aussi, la pluie inspire. Pour tous ces petits détails et bien d’autres encore, la pluie glissant sur une fenêtre attire comme un aimant. Et justifie une nouvelle série de photographies. Irisation, décomposition, éclatement, pénombre… C’était cet après-midi. Il y avait des gouttes de pluie sur La fenêtre. Bonne pluie !

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Pourquoi vouloir à ce point gratter le ciel ? Modernité contre tradition… L’une ouverte sur le monde, les fenêtres tournées vers la lumière, gigantesque, protectrice, parfois pesante. Une symétrie, n’empêchant pas une certaine originalité de forme, des finitions esthétiques… L’autre, un enchevêtrement d’étages se faisant mutuellement de l’ombre, tronquant ainsi le champ visuel de leurs occupants, se serrant un peu les coudes pour voir plus loin. Des tours identiques, hormis par leur taille. Evidemment, l’illusion aurait pu fonctionner 5 secondes de plus si ce van n’était pas entré dans le cadre au moment du clic clac fatal… Car ces immeubles sont faux : une œuvre d’art à ciel ouvert, comme il en est exposé un certain nombre à New York. Mais ne ressemblent-ils pas à ceux entre lesquels nous déambulons, par exemple ceux de Sans perspective ? Et, au final, est-ce cette uniformité, cette absence d’imagination, cette conformité qu’a apporté la modernité ?

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J’ai croisé James Dean l’autre jour. En plein Montréal. Par un mardi après-midi très ensoleillé. Il était 15h23 précisément. Il était sur son vélo, à un coin de rue, vêtu comme à sa grande époque, entouré d’un halo de lumière poussiéreuse, et surtout aussi jeune que dans mes souvenirs de cinéphile. Peut-être avait-il un peu maigri. Lorsque le feu est passé au vert, il a continué son chemin, naturellement. Personne d’autre que moi ne semble l’avoir remarqué. Voilà, je m’auto-ajoute à la liste des illuminés persuadés d’avoir vu Elvis, Marilyn Monroe ou Michaël Jackson en vie, car ils n’arrivent pas, pour des raisons x ou y, à se faire à leur disparition. Là, pas de problème de ce côté là. C’est juste une illusion d’optique.

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Voilà comment se discréditer en quelques heures, même si j’ai, hier, admis la limite de ma critique ! La nuit tombant, les petites lumières se laissent distinguer tour à tour. Un vrai ballet d’étoiles ! C’est un peu comme à marée basse, la rive nous apparaît sous un autre angle. S’il est naturel de se sentir minuscule et insignifiant au pied de ces buildings, les rôles sont inversés une fois de l’autre côté. De la rivière, du pont, de l’espace… A distance. Certains détails, imperceptibles dès lors que l’on est plongé dans le tumulte citadin, la nuque à 90°, nous sautent alors aux yeux. Comme cette chauve-souris immense aux ailes repliées, encore endormie. Postée innocemment entre deux immeubles, elle attend que la nuit soit totalement tombée pour couvrir, de son aura protectrice, la cité… God damned !

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Ceci est la Tour Montparnasse. Evidemment, sous cet angle, cela peut être difficile à croire. En y regardant de plus près, on distingue ses petites fenêtres éclairées. On pourrait même les compter. C’était un peu agité ce soir-là. Bref.

Je suis en bien mauvaise position pour me plaindre du fait que les lumières de la Tour et consorts soient allumées le soir, mais, les promenades nocturnes  dans quelque grande ville que ce soit peuvent faire douter de la motivation réelle des décideurs à sauver notre planète ! Il est certain que c’est plus esthétique qu’un black out urbain (et encore), mais que de watts gaspillés pour montrer que l’on existe… Une goutte d’eau, pourrait-on penser… mais une goutte plus une goutte etc. Comme cela est déjà proposé pour les voyages en avion, des petits guichets seront bientôt installés au bas de ces immeubles (La Défense en est remplie) illuminés le soir comme des sapins à Noël, pour racheter les émissions de CO2 consécutives à notre utilisation de l’ascenseur. Et dans quelques années, lorsque nous serons presque 9 milliards sur la planète, ce sont les naissances qui seront taxées…

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Les premières fois, quelles qu’elles soient, ont toujours un petit goût particulier. Pour certaines, on se demande d’ailleurs comment l’instant n’a pas pu se présenter avant. C’est vrai, un orage, finalement, c’est assez courant ! Même en ville. Ce qui l’est moins, c’est de pouvoir le photographier. Les villes habitées étant souvent peuplées d’immeubles hauts, seuls les plus chanceux ont un ciel ouvert offert à leurs yeux. Cette hauteur oriente notre regard, souvent stoppé net par une façade lorsqu’il s’aventure à se projeter à l’horizon. Lever la tête pour avoir droit à une étroite fenêtre sur le ciel.

Montréal est une ville basse. Avec beaucoup d’habitations de 2, 3 étages principalement. A tout moment, le ciel est présent, dans sa globalité. Il s’étend nonchalamment comme s’il était chez lui, au lieu de se frayer un chemin entre les briques arrangées. A fortiori, un soir d’orage. Ce qui rend plus faciles certaines premières fois, donc. Enfin, moins difficiles. Car, réussir à capturer un éclair dans sa boîte noire relève, pour le néophyte, d’un lumineux coup de chance ! On tente de raisonner, on croit pouvoir définir un cycle, prévoir leur manifestation, on compte le temps entre le tonnerre et l’éclair pour évaluer la distance au son et lumière gratuit, et après plusieurs échecs, on finit par cadrer large et mettre un temps de pause suffisamment long en se disant qu’il y tombera bien « quelque chose ». Le plus souvent, un halo lumineux, comme s’il faisait jour en pleine nuit. Et dans le tas, miraculeusement, un éclair. Qu’on manque d’effacer dans la précipitation. Un bel éclair torturé mais bien décidé, venant s’échouer dans une zone pas si lointaine. Une magie. Qui ne se reproduit pas. Le résultat n’a rien d’extraordinaire. Seulement, le seul fait d’être la première image de ce genre la rend extra-ordinaire… L’orage se déplace, des trombes d’eau balayent les rues désertées, les premières feuilles jaunes tombent au sol, les flashs se détournent, le tonnerre gronde toujours, mais il est déjà plus sourd. La tempête se poursuit ailleurs. Avec sûrement, à d’autres fenêtres, d’autres admirateurs…

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La curiosité ? Celle qui pousse à laisser traîner ses yeux du côté des fenêtres de rez-de-chaussée ou des portes lorsqu’elles sont entre-ouvertes. On y découvre des bribes de vie. Des bouts d’existence dont on ne connaît ni l’avant ni l’après. Parfois, c’est simple : une télévision allumée sur un jeu de fortune, une personne hachant des carottes, une autre faisant un somme sur le canapé, des enfants en train de chahuter dans leur chambre.

Le spectacle est parfois plus énigmatique. Comme dans ce garage pris au détour d’une balade maltaise en fin de journée, fortement éclairé par une lumière hors champ… On cherche des indices qui pourraient nous aider à deviner ce qui s’y trame. Deux balais, une corde enroulée à terre, un cintre poussiéreux, des câbles électriques fixés au mur, un casque de protection auditive, un tablier plastifié pas trop sali, et juste à côté, une vieille photo en noir et blanc penchée et accrochée à l’un des tubes d’alimentation.

Après énumération, l’ensemble reste une énigme. Un garage ? Oui, mais pourquoi un tablier en plastique blanc, qui laisse supposer que ce qui est susceptible de se retrouver dessus peut s’effacer avec un peu d’eau. En fait, on dirait un tablier de boucher. Ce qu’il n’est pas. De la peinture ? Le port n’est pas loin. Mais il n’y a aucune tâche au sol, qu’il s’agisse d’huile ou de peinture. Ce qui attire le plus le regard a posteriori, c’est cette photo – absolument pas repérée dans le feu de l’action – sur laquelle on peut plus ou moins distinguer cinq personnes. Comme la trace d’un bonheur passé, d’un moment de gloire, d’une fine équipe précieusement conservée depuis et vers laquelle le propriétaire des lieux peut se tourner, au présent, comme pour mieux se souvenir.

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Des petits gravillons jetés à l’envi sur un bassin un peu trop d’huile… Un tsunami à échelle locale. Front d’ondes de cercles parfaitement concentriques venant grimer le reflet de quelques branches paisibles dessinées au couteau.

Mais grave, l’heure l’est effectivement si l’eau ne tombe plus lorsqu’on la met à la verticale… Il est quelques repères comme celui-ci qu’il ne faut pas bouleverser, sous peine de voir un monde entier s’écrouler. Voire s’écouler…

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