Photo-graphies et un peu plus…

Un même homme – l’un affichant un sourire naïf de période pré-électorale, l’autre le sérieux de la mission acceptée -, deux opinions diamétralement opposées rendues publiques à des milliers de kilomètres l’une de l’autre et quelques mois d’intervalle. A l’espoir bombé en noir sur la porte condamnée d’un immeuble d’un Brooklyn en pleine réhabilitation répond un portrait désormais devenu icône assorti d’une légende lapidaire, War criminal, collé sur un distributeur de The stranger, journal culturel de Seattle. Cette juxtaposition, violente, avec l’étranger, ne peut être fortuite.

Curieusement, cette critique ouverte de Barack Obama me surprend presque. C’est en fait la première fois que je croise le chemin d’un témoignage négatif à son égard sur le territoire états-unien. Comme si, après avoir été porté aux nues et présenté comme le leader d’un monde nouveau, son messie, l’homme, un temps Intouchable, était redevenu un homme, politique, comme un autre, donc ouvertement critiquable. Nul doute que la mort du « pire ennemi de l’Amérique » ou du « terroriste le plus recherché du monde », une décennie après l’inoubliable nine eleven, jouera massivement en sa faveur… Quel graffiti, quel autocollant, quel message naîtront alors de ce que tout le monde presque entier qualifie déjà de « bonne nouvelle » ?

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Les petites filles ne sont manifestement plus ce qu’elles étaient. Enfin, c’est la conclusion, certes sûrement un peu hâtive, qui vient d’emblée à l’esprit en étudiant ces deux spécimens version 2011. Hautes comme trois pommes toutes les deux, sans avoir aucun lien de parenté avec Tom Sawyer. La première déambulant dans la rue en talons, jupe à froufrou, petite veste cintrée, et se passant nonchalamment la main dans les cheveux. La seconde prenant naturellement quelques photos avec l’appareil numérique de maman : la petite famille assise sur le sable, les gens s’amusant sur la plage, les bateaux à l’horizon… Un trio de photos exécuté promptement, juste le temps de pivoter dans les trois directions visées, et l’appareil est rangé soigneusement dans sa pochette. Une rapidité qui n’empêche pas l’apprentie photographe, qui connaît vraisemblablement ses classiques, de cadrer ses images, à bout de bras, car c’est ainsi que l’on prend des photos désormais. A distance. Heureusement, tous nos repères n’ont pas encore vacillé sous le poids de la modernité et de la tentation de certains parents à faire pousser des mini-eux plutôt que des enfants. Ainsi, certaines valeurs sûres (au grand désespoir de quelques uns) persistent-elles, résistant aux sirènes des nouvelles technologies et aux envies de grandir trop vite : le rose ! Quand les petites filles ne porteront plus de rose, alors, il faudra commencer à s’interroger sur l’équilibre du monde…

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– Redresse-toi un peu, je ne te vois pas bien !

La jeune femme s’exécute et se met sur la pointe des pieds. C’est mieux. Elle prend aussi la liberté de poser sa main sur le visage de l’homme. Pierre. Il s’appelle Pierre. Avec les autres, ils attendent l’interurbain. Cela fait longtemps qu’ils attendent. 33 ans précisément. Juste le temps de se fossiliser. Et de se murer dans un silence de plomb. Non, d’aluminium.

Au début, les automobilistes les regardaient lorsqu’ils arrivaient au feu. Aujourd’hui, ce ne sont plus les sculptures qu’ils observent, mais les innombrables touristes qui ne peuvent s’empêcher de se mettre en scène avec ces personnages à la docilité légendaire. C’est une étrange manie d’ailleurs qu’a l’homo touristicus de s’infiltrer ainsi dans l’art urbain. Car, si, généralement, il se contente d’une immortalisation numérique devant ladite sculpture (« j’y étais »), il semblerait que dès lors que celle-ci soit une représentation de ses congénères (des êtres humains donc), il ressente le besoin irrépressible de se joindre à eux. De s’intégrer à la communauté. De les imiter. Quoiqu’ils fassent. Au risque de paraître ridicule. Mais, comme on le dit pour se rassurer, le ridicule ne tue pas… En voilà un autre ! Au pied de La Foule illuminée qui, le bienheureux ne le sait sûrement pas, représente la dégradation et la fragilité de l’espèce humaine…

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C’est une lapalissade, mais prendre un peu de hauteur nous permet souvent de voir les choses de la vie d’une autre manière. Au sens strict, comme au figuré. D’en bas, perdus dans d’étroites ruelles au charme pittoresque, on ne réalise pas vraiment à quel point les toits strasbourgeois sont pentus et percés d’autant de lucarnes, ni comment ces immeubles réussissent à s’enchevêtrer les uns dans les autres. D’en haut, cette fois-ci, d’étranges phénomènes se dessinent et se détachent de l’horizon. Ainsi en est-il de cette procession impromptue d’une colonie de fourmis noires, les phéromones en effervescence,  bouchant quasiment cette grosse artère centrale. Quelqu’un a dû faire tomber le pot de miel !

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Changer de « maison », autrement dit, déménager, n’est pas toujours simple. Tout dépend évidemment des raisons qui sont à l’origine du départ, mais, quoiqu’il en soit, c’est s’extraire d’un endroit que l’on connaît et maîtrise, où l’on a ses marques et ses repères. Un endroit où, si l’on entend un léger couinement pourtant indéfinissable par toute personne extérieure, on sait pertinemment qu’il vient de la quatrième latte du plancher du couloir qui n’a jamais été très bien fixée, et qui a tendance à craquer la nuit venue, alors que la température ambiante diminue… Arriver dans une nouvelle maison implique de tout reprendre à zéro, de trouver de nouveaux repères, d’être à l’écoute de la personnalité du lieu pour s’en faire un allier. C’est-à-dire, une place où l’on aura plaisir à vivre et à demeurer.

C’est un peu la même chose lorsque l’on change d’appareil photo après avoir baladé le même pendant des années. D’abord, on emporte les deux appareils, l’ancien et le nouveau, tout en continuant à n’utiliser que l’ancien. Il est encore trop tôt. Puis, petit à petit, on alterne une photo avec le nouveau, une autre avec l’ancien. On se convainc que telle image s’y prête mieux. De plus, on est encore persuadé que l’ancien fait mieux… Et puis, on finit par se lancer. On laisse l’ancien au placard en lui disant que l’on ne l’oublie pas pour autant, celui-là même que l’on chérissait, que l’on connaissait par cœur et dont on pouvait prévoir toutes les réactions, pour ainsi donner l’opportunité au nouveau de se faire sa place. Il le faut. On s’appréhende, on apprend à se connaître, à se lier l’un à l’autre. Cela commence donc par la prise en main, par la façon dont on va enrouler la lanière autour de l’avant bras pour faire corps avec lui… Toujours de la même manière… Et puis, viennent les tests… Comment réagit-il quand on le met dans telle ou telle condition ? Pourquoi cet horizon n’est-il jamais droit alors qu’il semble l’être dans le viseur ? Combien de temps lui faut-il pour déclencher ? Pourquoi cette bague de mise au point manuelle ne butte pas  l’infini ? Cet apprentissage, un réel apprivoisement en réalité, prend des mois… Et parfois, après une nième mise à l’épreuve, on se dit que l’on est dans la bonne direction et que l’on s’est peut-être enfin compris…

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« Le temps passe trop vite », « les journées sont trop courtes », « comment ? j’ai déjà 42 ans ! »… De courtes phrases qui sonnent comme l’écho au fond du Fish River Canyon namibien (c’est le 2e plus profond au monde ; simplement pour préciser qu’il y a encore de la marge). J’en connais des gens qui accepteraient de manifester contre ce temps qui file, brandissant des pancartes appelant à la grève pour une durée indéterminée tant que celui-ci n’aurait pas ralenti son rythme ! D’autres vendraient même leur âme à l’horloge parlante pour quelques heures de plus par jour…

Une petite heure, comme ça, ce ne serait pas une grande révolution pour le gouvernetemps, inflexible depuis des millénaires malgré les remaniements ministellaires. Pourtant, génération après génération, jamais il n’a plié. Car le temps… Ah, ah… Bref. Enfin, c’est ce que je croyais jusqu’à ce que je ne tombe œil à objectif sur cette vitrine. Il semblerait qu’il y ait des privilégiés à certains endroits de la planète et qu’ils ne soient pas pressés de le faire savoir ! Fermeture de la boutique à 25h le vendredi et le samedi ! Oui, oui, vous avez bien lu. J’hésite à divulguer où se trouve ce paradis de l’insatisfait chronique de peur de voir, moi-même, débarquer une faune que la ville n’est pas encore prête à accueillir. Encore trois journées classiques à attendre avant de vivre cette 25e heure. J’ai hâte ! J’espère que ça va passer vite ! Mais que vais-je bien pouvoir en faire, de cette heure supplémentaire ? Et surtout, à quel moment de la journée est-elle ajoutée, cette heure ?

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Nous espérons tous, plus ou moins et différemment, être comblés par notre vie. Les stratégies pour atteindre ce niveau de satisfaction sont nombreuses. Arrêtons-nous sur les deux plus évidentes : la première, croire en sa bonne étoile et attendre que le bonheur ou ce qui est susceptible de le provoquer, se présente à nous comme un bouquet de roses un jour de Saint Valentin ; et la seconde, bonne étoile ou pas, provoquer la chance, les opportunités et, d’une certaine manière, prendre la main sur le hasard, ou le destin, c’est selon les croyances personnelles… N’ayant tous qu’une vie – j’exclus les cas de métempsychose – et n’étant pas doté d’un don d’ubiquité parallèle, nous ne saurons jamais si l’une de ces options est préférable à l’autre. Il faudrait en effet pouvoir les suivre simultanément pour être en mesure de les comparer…

Cette double stratégie fonctionne aussi en photo. Parfois, le projet est très clair, très précis : par exemple, aujourd’hui, l’objectif est de photographier 46 voitures rouges, 23 femmes à chapeau, 12 pigeons sur un arbre et 3 chenilles sur l’herbe. Bon, la tâche n’est certainement pas aisée, mais elle a le mérite d’être définie, de fournir un cadre, et donc de laisser entrevoir une ligne de conduite. Se poster à un carrefour ou chez un concessionnaire Ferrari, aller fureter au rayon chapeau d’un grand magasin ou à la sortie de la messe, faire un tour au Jardin du Luxembourg et enfin, trouver des pêcheurs près d’une pelouse… Parfois, au contraire, il n’y a rien de vraiment arrêté. Comme ce jour-là. Je me suis agenouillée sur les pavés de cette historique rue des Saules sur la Butte Montmartre en espérant, passivement mais le doigt sur le déclencheur malgré tout, que quelque chose se produise. Je ne sais pas quoi exactement, qu’un train sorte de terre, qu’une bande de jeunes déguisés en pois chiche débarque… Evidemment, je ne m’attendais pas à ce qu’un simple canidé dé-laissé et renifleur de pavés entre nonchalamment dans le champ, sans même m’accorder la moindre attention ! Mais, c’est le risque à attendre que les éléments viennent à soi, ce qui s’apparente un peu à la stratégie du confiant-fainéant… Parfois, c’est reposant.

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Voilà une option plutôt radicale et renversante pour s’éviter quelques minutes de colère et un retour chez soi en danseuse après une bonne journée de travail… Mais que ne ferait-on pas pour sauver une selle visiblement très confortable des quelques âmes errantes malintentionnées qui courent les rues et les collectionnent ? Les selles. Que le pédalier soit transformé en récup-canette n’est alors qu’un moindre mal !

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Je me suis toujours demandé qui établissait la programmation de ces séances gratuites de panneaux publicitaires déroulant, tant les enchaînements proposés sont parfois audacieux. Ainsi en est-il de celui-ci, monté façon express pour être quasi subliminal (donc fatiguant) et rendre encore plus évident le sarcasme des presses et papiers. Même typologie d’image. Une silhouette sur fond uni : blanc versus noir. Même gestuelle : bras écartés,  en l’air versus à terre. Même message en bandeau avec un jeu de question-réponse qui paraît étrangement calculé. Même conclusion : l’un comme l’autre ont franchi la frontière violemment, de façon non naturelle, celle dont on nous dit, nous répète, qu’elle est la seule dont on ne peut revenir. La mort.

Nous allons peut-être devoir revoir nos classiques à la lumière de tout ce qui a été entrepris depuis la disparition de MJ pour que la flamme (les billets verts) reste toujours allumée (continuent à couler à flot) chez les fans (dans les poches de tous ceux qui en ont des bien placées). Ainsi s’annonce donc la 4e tournée de Mike, Bambi, le Roi de la pop : « The immortal world tour ». Qui est, il faut le dire, un titre hautement cynique ! Qu’est-ce que c’est que ce cirque, vous direz-vous (peut-être) ? Et bien, justement, c’est le Cirque du Soleil, connu pour ses shows magnifiques mais doté d’un contrôle qualité un peu trop pointilleux à mon goût, qui est à l’origine de ce projet humaniste et philanthropique. Enfin, qui a « uni ses forces avec la succession de Michael Jackson » pour créer ce spectacle, dont un premier tour de piste aura lieu en Amérique du Nord en 2011 et 2012. A peine un an et demi qu’il est décédé, et il ne se passe pas un jour sans qu’on ne le sorte de sa tombe. Si ce n’est une chanson inédite exhumée par ce héros récurrent, cet-ami-qui-lui-veut-du-bien-enfin-pas-à-lui, c’est un concours pour trouver « le nouveau Michael Jackson », puis un album posthume (dont la voix n’est potentiellement pas la sienne), des coffrets, un jeu vidéo, et donc ce spectacle. Bientôt, un clip en hologramme 3D j’imagine pour « matérialiser » un peu ces duos pré-enregistrés… Tout cela me renvoie à quatre phrases prononcées par l’artiste expérimentale Laurie Anderson lors de son spectacle « Le délire » donné à la Cité de la Musique (grand écart culturel, oui) et qui disaient, en substance : on meurt trois fois ; la première, quand on s’éteint ; la deuxième, quand on nous enterre ; la troisième, quand notre nom est prononcé pour la dernière fois. Finalement, le titre choisi par le cirque n’est peut-être pas si douteux. Car, il n’est pas encore né le jour où le nom de Michael Jackson ne sera plus émis (ah, ah, ah, ah, ah, ah, ah, ah, aaaahh…) !

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