Photo-graphies et un peu plus…

Etre loin de chez soi ne dispense pas de s’intéresser à ce qui s’y passe. A suivre les nouvelles, comme on dit. La disponibilité de la presse sur Internet – celle qui existe d’abord pour le papier et celle qui n’existe que sur la Toile – rend même cette veille informationnelle plutôt facile de nos jours. Et finalement, on se prend à se tenir au courant de ce qui secoue notre monde temporairement écarté peut-être plus que de nature. La succession d’événements révolutionnaires qui ont fait basculer plusieurs pays arabes dans un nouveau monde, quel qu’il soit, a sûrement joué.

Mais que reste-t-il de ces nouvelles de l’autre côté de l’Atlantique ? La question vaut dans les deux sens… Quelles sont les informations jugées importantes d’un côté comme de l’autre ? Quelles sont celles, propres à tel ou tel pays, reprises par le lointain voisin ou cousin ? Quels sont les points totalement divergents qui viennent conforter l’idée d’une grande différence culturelle ? Un petit exercice consiste par exemple à ouvrir une fenêtre de Google News Canada et une autre de Google News France, et à s’atteler à un comparatif en bonne et due forme. Il est 01:52 GMT. Côté infos à la Une, il n’y en a aucune en commun. Sur les 11 mises en avant sur la version française, trois concernent l’international (problèmes en Arabie Saoudite, problèmes en Lybie, problèmes en Côte d’Ivoire), contre une sur la version canadienne (la révolution tranquille marocaine) et c’est une reprise du Monde, journal français donc. Le reste est de l’information à portée locale. Que le Canada soit légèrement auto-centré dans sa conception des nouvelles est une chose que j’ai entendue de la bouche même de québécois. Il faut dire que le pays est grand, mais il ne compte que 35 millions d’habitants… et beaucoup de fans de hockey (l’intégralité de la rubrique Sports lui sera consacrée, jusqu’à ce que la saison de base ball ne reprenne).

En fait, comme souvent, au quotidien, ce qui est le mieux partagé dans le monde, ce sont les mauvaises nouvelles : les guerres, les révolutions (et il y a donc le choix en ce moment), les catastrophes naturelles, les pandémies, les crises financières… Il est définitivement difficile de partager une bonne nouvelle. Tout comme il semble difficile de faire un film sur le bonheur. Le bonheur, est-ce si rébarbatif que cela ? Et si oui, pourquoi autant de personnes cherchent-elles à l’atteindre ? Revenons à nos informations et partons donc en quête d’une nouvelle réellement positive. Evidemment, tout cela est très subjectif. La rupture entre Christian et Adriana Karembeu illuminera peut-être la journée de certains. Côté France, il n’y a aucune bonne nouvelle universelle (ne parlons pas des records de vente de la XBox qui ne ravissent que Microsoft et ses actionnaires ou du déblocage du port de Marseille). Côté Canada, je repère une petite nouvelle scientifique sur des nanodiamants qui augmenteraient l’efficacité de traitements contre le cancer… Mauvaise nouvelle, cela risque de coûter très cher ! Maigre butin dans les deux cas donc.

Que pourrait d’ailleurs être la nature d’une bonne nouvelle universelle ? La fin de la faim dans le monde (non pas parce que l’on produira assez – actuellement, 9 milliards de personnes pourraient être nourries – mais parce que l’on produirait ce qu’il faut où il faut, sans excès) ? Un remède simple et bon marché contre le paludisme ? Il en faudrait un troisième car les exemples arrivent souvent par trois. Bon, en fait, le tabac, actif, passif, fait cinq fois plus de morts chaque année (5 millions en 2010) que le paludisme. Sauf, qu’a priori, on choisit de fumer, pas de contracter cette maladie. Et le réchauffement climatique, qui touche absolument tout le monde, n’en fait que 300 000 par an pour le moment… Il y a donc d’autres priorités pour une bonne nouvelle universelle. Ceci dit, cela devrait aller en augmentant… Alors, un troisième exemple pertinent serait de généraliser l’accès à l’eau potable qui, avec ses 8 millions de morts chaque année, est la première cause de mortalité dans le monde (ex-aequo avec le cancer). Peut-être faut-il faire preuve d’un peu plus de modestie et de réalisme pour cette quête de bonne nouvelle universelle… En fait, le bonheur comme la bonne nouvelle, semble parfois avoir le goût de l’indécence, de la futilité, de l’illusion alors que « tant de choses sérieuses surviennent dans ce bas-monde ». La bonne nouvelle ne s’affiche pas, ne se partage pas. Elle se savoure, dans son coin, comme une sucette à la menthe rafraîchissante, loin du cynisme qui nous envahit assez facilement lorsque l’on y pense un peu trop.

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Parfois, une même caractéristique peut être à la fois une qualité et un défaut, un même objet source de progrès ou de régression, une même personne générer de l’amour ou de la haine, sans que cela soit paradoxal ou incompatible. C’est alors notre humeur du moment qui nous pousse à voir soit son côté positif soit son côté négatif. Ainsi en est-il de la photo numérique. Certes, le fait de pouvoir faire des centaines voire des milliers de photos avant de remplir une carte mémoire, de pouvoir stocker toutes ces images sur un support virtuel, en somme, de pouvoir devenir un photographe compulsif et totalement irréfléchi pour pas cher peut, à moyen terme, soulever un certain nombre de problèmes – mais que faire de toutes ces images ?, est-ce que j’en imprime finalement ou pas ?, et si oui, lesquelles ?, et si non, mais à quoi cela sert-il alors ?, je n’ai plus de place sur mon ordinateur, je ne retrouve plus cette photo d’arc en ciel que je suis sûre d’avoir rangée là, à moins que ce ne soit là, quel fichier déjà ?

Ces mêmes raisons peuvent, au contraire, être source de liberté. Je n’aurai, par exemple, probablement jamais tenté de faire cette photo nettement hasardeuse avec un appareil photo argentique. Tout simplement car pour en avoir une qui satisfasse, il faut pouvoir en faire 20 sans craindre de percer son panier car les pellicules se font rares, que le développement a son prix, et que de toute manière, il n’y en aura aucune de bonne. Cette générosité du numérique désinhibe presque totalement. Et l’immédiateté qu’il offre – décriée un jour en ces pages, c’est certain : fais voir ! fais voir ! – n’est alors pas une marque d’impatience, mais une sorte de guide, d’aide en direct pour atteindre, par dichotomie, l’image imaginée. Comme si le numérique avait permis de déployer notre créativité… Cela, c’est évidemment très positif !

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A quelques jours d’achever une année complète de duos quotidiens (que se passera-t-il après ?), je réalise qu’aucun ne porte sur la Tour Eiffel. Cela ne pourrait être qu’un constat sans suite. Je n’en ai pas fait non plus sur la pyramide de Gizeh ni sur la Place Rouge à Moscou. Une raison simple à cela : mon corps ne m’y a pas encore traînée. Mais, en parisienne, même lointaine que je suis – la distance étant peut-être liée à cette urgence soudaine, de la nostalgie ? non… – je ressens le besoin, de fait, pressant, de réparer ce presque oubli. Et de consacrer un peu d’espace et de temps à cette figure symbolique dupliquée à des millions d’exemplaires sur des cartes postales, des photos de visiteurs d’un jour ou de toujours.

De mon côté, il faudrait probablement aller fouiller dans les cartons, donc, remonter quelques années en arrière, pour trouver une photo-reproduction de cette tour de fer puddlé montée en 2 ans, 2 mois et 5 jours, et qui a dû patienter 70 années avant de connaître une gloire internationale. Et ce n’est pas lui manquer de respect, il me semble, que de la faire apparaître sous un nouveau jour. En l’occurrence, nuit. Une de ces nuits irréelles et inspirées d’où émanent des images à la fois vraies – pas de post-manipulation – et fausses – ce n’est pas ce que l’on voit en regardant dans cette direction. Une passerelle Debilly désarticulée, un doublé métallique éclairé… La Tour aux 1665 marches s’évade de ce champ où elle est ancrée depuis bien longtemps déjà, traînant son double spectral comme un boulet. Faire trembler l’immuable, un beau dessein photographique, non ?

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Nous espérons tous, plus ou moins et différemment, être comblés par notre vie. Les stratégies pour atteindre ce niveau de satisfaction sont nombreuses. Arrêtons-nous sur les deux plus évidentes : la première, croire en sa bonne étoile et attendre que le bonheur ou ce qui est susceptible de le provoquer, se présente à nous comme un bouquet de roses un jour de Saint Valentin ; et la seconde, bonne étoile ou pas, provoquer la chance, les opportunités et, d’une certaine manière, prendre la main sur le hasard, ou le destin, c’est selon les croyances personnelles… N’ayant tous qu’une vie – j’exclus les cas de métempsychose – et n’étant pas doté d’un don d’ubiquité parallèle, nous ne saurons jamais si l’une de ces options est préférable à l’autre. Il faudrait en effet pouvoir les suivre simultanément pour être en mesure de les comparer…

Cette double stratégie fonctionne aussi en photo. Parfois, le projet est très clair, très précis : par exemple, aujourd’hui, l’objectif est de photographier 46 voitures rouges, 23 femmes à chapeau, 12 pigeons sur un arbre et 3 chenilles sur l’herbe. Bon, la tâche n’est certainement pas aisée, mais elle a le mérite d’être définie, de fournir un cadre, et donc de laisser entrevoir une ligne de conduite. Se poster à un carrefour ou chez un concessionnaire Ferrari, aller fureter au rayon chapeau d’un grand magasin ou à la sortie de la messe, faire un tour au Jardin du Luxembourg et enfin, trouver des pêcheurs près d’une pelouse… Parfois, au contraire, il n’y a rien de vraiment arrêté. Comme ce jour-là. Je me suis agenouillée sur les pavés de cette historique rue des Saules sur la Butte Montmartre en espérant, passivement mais le doigt sur le déclencheur malgré tout, que quelque chose se produise. Je ne sais pas quoi exactement, qu’un train sorte de terre, qu’une bande de jeunes déguisés en pois chiche débarque… Evidemment, je ne m’attendais pas à ce qu’un simple canidé dé-laissé et renifleur de pavés entre nonchalamment dans le champ, sans même m’accorder la moindre attention ! Mais, c’est le risque à attendre que les éléments viennent à soi, ce qui s’apparente un peu à la stratégie du confiant-fainéant… Parfois, c’est reposant.

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Voilà une option plutôt radicale et renversante pour s’éviter quelques minutes de colère et un retour chez soi en danseuse après une bonne journée de travail… Mais que ne ferait-on pas pour sauver une selle visiblement très confortable des quelques âmes errantes malintentionnées qui courent les rues et les collectionnent ? Les selles. Que le pédalier soit transformé en récup-canette n’est alors qu’un moindre mal !

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Je ne résiste pas à cette nouvelle confrontation, certes un peu grossière, des mœurs entre ces deux terres qui bornent les parties nord de l’Océan Atlantique. A l’heure où l’on parle à l’envi de manipulation des foules par la peur (une stratégie plutôt ancienne en réalité), la juxtaposition totalement anachronique de ces trois images peut laisser songeur. Direction Boston. Ville bourgeoise et calme, dont la réputation est en partie assurée par ses universités prestigieuses, Harvard et le MIT en tête. C’est à cette paisible cité qu’appartient l’abribus. « Ready for a disaster ? » Curieuse approche pour une publicité ? Une assurance peut-être ? Trois pictos assez explicites, des légendes courtes aux allures d’injonction et une adresse de site internet, très simple mais surtout gouvernementale. Il ne s’agit pas d’une publicité comme une autre, mais d’une sorte d’appel à la population générale pour l’encourager à se préparer au désastre… Dans une ville paisible donc. Toutefois, c’est souvent là où il ne se passe rien que l’on aimerait faire croire qu’il pourrait se passer des choses.

L’affaire resterait sans suite si cette annonce ne bénéficiait pas d’un plan de communication digne d’une boisson gazeuse à quatre syllabes. L’affiche, des plus sobres donc efficace, est partout, faisant presque croire à l’imminence du désastre annoncé. Pourtant, un petit tour sur le dit site nous apprendra que cette campagne existe depuis 2003, comme c’est étrange. On y apprendra aussi à se constituer un kit de réserves d’urgence, à préparer un plan familial d’urgence et à se tenir informé sur ce qu’est une urgence… Les plus angoissés pourront répondre à un quiz pour connaître leur Quotient de préparation. Mais de préparation à quoi ? Une liste des désastres potentiels – une petite vingtaine – figure évidemment sur le site, parmi lesquels les menaces biologiques, chimiques, les pannes d’électricité, les ouragans, les pandémies de grippe, les menaces nucléaires, les ouragans… Je ne trouve pas le mot « terrorisme » mais il est caméléon et vit sous d’autres noms. Car, c’est évidemment de cela dont il s’agit. Bon, il y a aussi les tremblements de terre.

Ce qui pourrait expliquer l’existence de l’affiche rose. Direction la côte Ouest et la non moins intellectuelle ville de Berkeley. On est en Californie, il fait beau mais on a la tête bien pleine. Zone pavillonnaire, et cette affiche rose donc. Bien plus petite que les affiches du gouvernement, mais du rose, ça attire l’œil à 10 mètres. L’idée ? Des réunions de quartiers pour se préparer collectivement à des séismes effectivement, mais pas uniquement. A des désastres, aussi. Un appel au bénévolat pour faire partie de la super équipe de réponse d’urgence… Face à ces deux discours, le réflexe un peu trivial a été de penser : « oh my god, it is so american !« . Cette façon de se préparer méticuleusement à la guerre même quand il n’y a pas d’ennemi. Evidemment, un peu de prévention ne fait pas de mal, et même plutôt le contraire. Et ce n’est pas avec nos sirènes de pompier qui sonnent tous les mercredis du mois que nous pouvons affirmer que nous sommes préparés au désastre. Mais, de toute manière, en France, on a réglé la question autrement : avec des affiches qui nous exhortent à ne pas avoir peur. Et s’il n’y a aucune raison d’avoir peur, il devient inutile de se préparer à ce qui pourrait faire peur… Et, là, il faut l’avouer, ce « N’ayez pas peur » fait finalement plus peur que le « Ayez peur » subliminal des Américains !

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Drôle de métier que celui de Monsieur Léger… Depuis 47 ans, il parcourt les villes et villages de France et de Navarre pour leur voler quelques centimètres cubes d’air qu’il emprisonne méticuleusement dans d’antiques et magnifiques bouteilles de la pluricentenaire brasserie Mapataud dont déborde son estafette bleue claire.

Chaque fois, c’est le même rituel : il se rend préférentiellement dans un parc, le poumon de la ville comme on dit, inspire un grand coup pour tester l’air, regarde autour de lui, puis décapsule la bouteille… Il la tend alors vers le ciel et au bout de 14 secondes exactement – il a toujours sur lui le vieux chronomètre, une authentique copie du premier chronomètre qui fut, celui de John Harrisson, et que lui a offert son grand-père le jour de ses 14 ans, qui lui-même le tenait de son grand-père – il referme la bouteille d’un coup sec. Il ouvre alors son modeste cartable de cuir adouci par les années et en extrait une petite étiquette sur laquelle il note le nom de la ville à qui appartient cet air captif, et qu’il colle sur la bouteille. Il range alors celle-ci dans un casier aux côtés de ses congénères.

Monsieur Léger n’a qu’une règle : ne remplir qu’une seule bouteille par ville. Le jour où il a réussi à engranger 67 bouteilles, il s’arrête en plein milieu d’un champ, sort sa carte de France  parsemée de trous puis un compas, qu’il plante exactement à l’endroit où il se trouve. Il l’ouvre de 4,8 centimètres et trace un cercle. Monsieur Léger ne voit plus tout à fait bien maintenant, aussi se sert-il d’une loupe pour trouver la ville la plus grande qu’englobe cette surface. Elle marque la dernière étape de sa tournée. Le dimanche, à 5h42 du matin, quel que soit le temps, il est le premier sur la place du marché à installer son stand et à aligner ses bouteilles les unes derrière les autres. Il a bien conscience de vendre quelque chose de différent par rapport à ses voisins maraîchers ou fromagers, mais il sait aussi d’expérience que ses bouteilles étiquetées intriguent. Alors, il attend, sur son petit fauteuil en osier, que quelqu’un ose lui poser une question. Et il y a toujours un moment où une personne lève l’index et dit :

– Excusez-moi ? Qu’y a-t-il dans ces bouteilles ?

– De l’air ! s’empresse-t-il alors de répondre, anticipant déjà ce qui va suivre…

– Juste de l’air ?

– Oui, mais de l’air de La Rochelle, de Cahors, d’Agen… Voyez, c’est écrit sur les étiquettes…

– Ah oui, lui répond l’autre, dubitatif… Mais, il a vraiment une autre odeur l’air de Cahors par rapport à celui de Colmar ?

– Evidemment, mon ami ! Sinon, pourquoi passerais-je ma vie à le récolter ?

Le curieux, pensif, se met alors à regarder les bouteilles plus précisément.

– Peut-on ouvrir celle-là ? finit-il par demander en montrant la bouteille de Biarritz (toujours avec son index). J’ai toujours rêvé d’aller à Biarritz.

– Malheureux ! Mais si vous ouvrez la bouteille, son air va se mélanger avec celui d’ici et vous ne pourrez jamais savoir en quoi il était différent !

En général, dépité, le curieux s’en retourne et l’air de rien, Monsieur Léger, est heureux.

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Le ciel était si bas ce soir-là que l’ombre de la sculpture de Napoléon trônant au sommet de la colonne Vendôme, loin de se perdre dans le vide de la nuit, était restée étonnamment accrochée aux nuages, tel un signal de détresse envoyé à un super héros local…

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Les voyages forment la jeunesse, entend-on souvent dans la bouche des adultes. Ils aiguisent le regard aussi, la curiosité. Font ressortir certaines dissemblances et similitudes d’un pays à l’autre. Ainsi, pour une raison que je ne m’explique pas encore, les bourses d’ici et d’ailleurs sont souvent hébergées dans des bâtiments assez similaires. En l’occurrence, des palais à colonnes, au style corinthien. Une architecture historiquement vouée aux dieux. Enfin, ceux qui pensent l’être. Encore aujourd’hui. Voyez le Palais Brongniart à Paris, absent du triptyque, ce qui ne fait que confirmer la règle sus-dite. Napoléon 1er en est l’initiateur au début du 19e siècle et en parle alors comme du « thermomètre de la confiance publique »… Deux siècles plus tard, je ne sais qui oserait encore prononcer ces mots face à ce temple de la finance et hôte de certains des plus vils vices humains.

La vision de Wall Street date de 2005, avant la crise, époque flamboyante. Une immense bannière étoilée proclame une fierté indécente occultant ces colonnes corinthiennes. A l’extrême droite, La Borsa de La Valette, prise il y a quelques mois, fait profil bas. Pas de drapeau flottant au vent. Et des colonnes se démarquant bien de la force obscure prête à les engloutir. Entre temps, les bourses se sont effondrées et les étoiles se sont repliées sur elles-mêmes. Et l’on comprend alors peut-être pourquoi elles sont ainsi conçues. Ces piliers ne jouent ni plus ni moins que le rôle de ces colonnes métalliques installées, en dernier recours, dans une maison dont le plafond, et le reste, menace de s’écrouler… Des béquilles.  Et l’image centrale alors ? La statue ? Elle (il s’agit ici d’une reproduction) trône au sommet de la Chicago Board of Trade, un magnifique bâtiment Art Déco, où l’entrée en colonnade est réinterprétée de façon plus rectiligne. Il y a quelque chose d’étonnant dans cette sculpture de Cérès (près de 10 mètres de haut en vrai). Son visage n’est qu’une boule de métal sans nez, yeux, bouche, oreille, qui ne sent rien, ne voit rien, n’entend rien, ne dit rien, et de fait, n’a pas d’identité. La raison invoquée par son créateur croyant à l’époque qu’il n’y aurait pas bâtiment plus élevé dans la cité d’Al Capone ? Personne n’en verrait les détails à cette hauteur. Omission symbolique a posteriori et faisant de ces places indéchiffrables des endroits désincarnés où l’équilibre du monde est menacé…

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