Il y a titre et titre… Il y a des titres énigmatiques et des titres transparents. Il y a des titres qui nous font comprendre le sens de l’image – qu’il s’agisse d’une photographie, d’un tableau, d’une sculpture, d’une installation, … – et des titres qui nous laissent perplexes – « ah oui, je vois mieux maintenant ! Heureusement que c’est écrit car je n’aurais pas reconnu ! ». Il y a des titres qui nous permettent de dépasser ce que nous voyons, ajoutent une dimension à l’image, et des titres qui ne font que verbaliser ce que l’artiste nous montre déjà. Est-ce volontaire ? Une manière pour l’artiste de pousser le contemplateur à ne se focaliser que sur son œuvre et à faire en sorte qu’il ne soit pas distrait par des mots qui l’emmèneraient ailleurs ? Comment ce dernier choisit-il la nature du titre qu’il va donner à son œuvre ? Est-ce seulement une question d’inspiration ? Et pourquoi existe-t-il des images « Sans titre » ? Est-ce par fainéantise ? – après tout, le mot et l’image sont deux entités bien distinctes – ou, parce qu’elles se passent de commentaire ?
Marchez tout en regardant fixement un point dans le ciel, comme si vous suiviez quelque chose du regard, et vous serez bientôt imité par deux ou trois personnes témoins de votre petit manège. L’effet miroir est quasi instinctif, motivé par notre insatiable curiosité. Le constat semble aussi vrai avec la photographie… Exemple pris parmi d’autres avec cette image. Direction les jardins de la Fondation Miró sur les hauteurs de Barcelone. Quelques personnes se promènent sur la terrasse. Une double porte vitrée empêche le visiteur de s’approcher de cette sculpture dont je ne trouve pas le nom. Il y a un interstice entre les deux parois de verre légèrement bleutées, permettant – malgré la transparence – de voir d’une autre manière ce qui se trame de l’autre côté. A savoir, dans ses couleurs originales.
Cet espace de vérité coincé entre deux frontières à la fois translucides mais matérialisées capte mon attention : j’en fais mon objectif pour cette photographie et m’attèle sérieusement à mes cadrage-réglage. Cela prend quelques secondes, peut-être minutes – pas trop non plus -, laps de temps pendant lequel je vois entrer plusieurs personnes dans mon champ visuel. Je suis certainement restée trop longtemps au même endroit pour passer inaperçue… L’œil sur le viseur et les doigts sur la gâchette, je les vois s’approcher de la double porte… Ma photo en poche, je me recule pour assister au spectacle : trois personnes dégainent leur appareil photo et y font entrer la sculpture, que je n’ai toujours pas identifiée. Mimétisme photographique parfait, à ceci près qu’aucune n’a jugé pertinent de se placer au cœur de l’ouverture. Peut-être se sont-elles dits que ces deux bandes verticales allaient gâcher la photo, alors qu’à mes yeux, elles en sont le sel. Et voici comment trois innocents petits centimètres réussissent à créer une grande différence malgré l’apparente similitude des gestes…
Ce soir, je ne suis pas d’humeur à écrire plus que le fait que je ne suis pas d’humeur à écrire ce soir.
A l’heure où beaucoup sont à dénicher des cœurs dans des choux-fleurs, des nuages de lait ou même des miches de pain, c’est une tête de mort qui me saute aux yeux au cœur de ce tronc scié de dépit… N’est-ce pas là un fait bien étrange, qu’un arbre, qui n’est plus, fasse ainsi apparaître […]
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