Là, flirtant nonchalamment avec les 10 000 mètres d’altitude, dans un monde où le ciel est toujours bleu, je me prends à rêver de l’impossible : m’extraire de cet aéroplane pour dévaler cette longue aile inclinée, filer droit vers cette mer de nuages infinie au charme aussi irrésistible que celui déployé par Charybde et Scylla face aux navigateurs et poursuivre ainsi le voyage jusqu’au bout du bout du monde en sautant de flocon en flocon comme s’il s’agissait de trampolines célestes…
Certes, la chaleur actuelle donne des envies de Pêche Melba et de Banana Split, mais ce n’est pas elle qui a motivé mon choix iconographique du soir. En tout cas, pas consciemment. Mais laissons cet abîme au fond de son trou pour aujourd’hui. Non, c’est juste une idée, ou plutôt un constat : cette photographie serait impossible à faire en été. J’en entends déjà certains dire qu’il s’agit là d’une lapalissade puisqu’en cette saison, il n’y aurait pas de neige. Il pourrait y avoir de l’herbe et la photographie serait simplement différente. Non, en été, en lieu et place de cette plaine enneigée, il y a de l’eau. A l’état liquide.
Car cet espace n’est autre qu’un lac, présentement gelé, ce que le profane ne réalise pas instantanément. Et en cette qualité de néophyte des hautes latitudes et de leurs conséquences hivernales, il met aussi un temps certain à comprendre que cette saison virginale et figée lui offre une alternative inédite : au lieu de longer et de faire le tour du lac pour rallier le point de bifurcation suivant de sa randonnée, comme lui indique sa carte toutes saisons, il peut marcher sur l’eau. A l’état solide. Moins biblique mais tout aussi épique. Une sorte de CAFAMUFODAVI naturel en quelque sorte.
Comme toute première fois, il y a une petite appréhension une fois la décision sérieusement envisagée : toutes les scènes de films où un personnage traverse un lac gelé et où la glace gronde, craque puis se fissure avant de s’ouvrir sous ses pieds, l’engloutissant dans des eaux si noires et si glaciales qu’elles ont rapidement raison des battements de son cœur remontent à la surface… Un petit frisson rapidement effacé par la raison et l’observation : manifestement, des véhicules apprécient également le raccourci. Rapide calcul : être humain + autre être humain < voiture. Un verdict si réconfortant que l’on se prend à défier la couche de glace en sautillant dessus à plusieurs reprises. Et après des premiers pas hésitants, c’est assez fier que l’on file de l’autre côté du lac, bercé par cette douce et naïve impression d’être un sacré aventurier !
La vie de silhouette à terre est finalement assez triste : son destin est déjà tout tracé, voire piétiné, avant même que son emplacement définitif ne soit déterminé. Elle me paraît même un peu cruelle à vrai dire quand, comme ici, elle doit suggérer le mouvement alors même qu’elle est clouée au sol, immobile, condamnée à regarder devant elle, à la verticale, et à voir les gens, autos et nuages défiler sans lui prêter la moindre attention. C’est un peu comme si on stoppait net une partie d’1, 2, 3 Soleil, laissant les joueurs dans une position instable jusqu’à la fin de leur existence. On aurait envie d’aller les bousculer pour, qu’au moins, ils puissent aller au bout de leur élan. Envie exacerbée avec cette silhouette faussement vagabonde prise dans une tempête de neige, artifice printanier qui lui confère un tout autre relief…
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Un tour du Soleil en duos : 6e année en cours
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