Quand, pour la première fois, mes yeux sont tombés sur la campagne d’affiches du film « Les infidèles », mettant notre Jean Dujardin au firmament de sa gloire et son compère Gilles Lellouche dans des positions suggestives… enfin, mettant deux bouts de femmes – littéralement : une paire de jambes et un ensemble cou-tête – dans des positions suggestives face à ces messieurs anticipant une future joie, j’ai lâché un « Oohhh, c’est osé !! » mais honnêtement, ça n’est pas vraiment allé plus loin. Cette campagne, destinée à n’être que temporaire et à attirer l’attention sur un film qui s’annonce au 18e degré, en a pourtant choqué plus d’une, à tel point que l’ARPP (l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité) en a demandé le retrait… Polémique qui m’a tout de suite ramenée deux trois mois en arrière, lorsque, au hasard d’un trajet en métropolitain, j’ai découvert cette publicité placardée sur tous les murs de la station traversée et qui m’a bien plus chatouillée. Culottée certes, mettant en branle l’hypocrisie de rigueur sur la question aussi, mais profondément cynique et reflet d’une société qui ne sait plus trop quoi inventer pour s’amuser tout en se faisant… des couilles en or ! Non, pas ça justement ou simplement métaphoriquement, puisque ce sont des femmes qui ont eu l’idée de génie de créer ce site qui se targue d’ailleurs d’avoir 1 140 255 membres. Desquels parlent-elles ?
Contrairement à ce que les apparences peuvent suggérer, je ne me suis pas muée en paparazzi, volant ainsi ce moment d’intimité et de complicité à ce jeune couple en quête d’aventure champêtre au cœur d’une campagne fleurie. Pour la simple et bonne raison que nous sommes en pleine ville. D’une ville qui voudrait donc faire croire qu’elle aussi, peut héberger un brin de nature dans laquelle ses habitants peuvent se lover en oubliant le tumulte et les curieux passants qui les entourent…
Une journée n’est jamais vraiment finie avant d’être réellement finie, c’est-à-dire, une fois que l’on est bien au chaud sous la couette voire endormi pour une nuit sans sursaut. Hier soir, vers 23h40, je lâche une de mes trivialités préférées dont la maîtrise m’échappe totalement :
– J’ai pas vu la semaine passer, on est déjà vendredi !
– Pas encore ! me rétorque-t-on avec optimisme…
Je pense :
– En même temps, étant donnée l’heure, il ne va plus se passer grand chose maintenant…
Je le pense mais ne dis à voix haute que les premiers mots – « En même temps, étant… » avant de m’autocensurer et de garder la suite pour moi. De crainte, étrange certes, de voir « quelque chose » se produire si j’officialise ma pensée.
Le voyage en métro se passe bien, en compagnie de gens aux petits yeux, pressés de se mettre au lit… Le voyage en métro se passe bien, jusqu’à un certain point. Un point où, alors que la rame entre en station, tout s’arrête. Coupure de courant. Nette. Il est peut-être 00h15, peut-être un peu plus. Et dans l’instant, une ombre se faufile dans l’interstice entre deux wagons, se hisse à hauteur de la porte et entre dans la dernière voiture, sous le regard médusé voire légèrement effrayé des personnes assises dans le sas, pour aller se poser tranquillement sur un siège et se fondre dans la masse comme si tout était normal. Quelques secondes après, le microphone éructe son crachin :
– Le courant a été coupé sur toute la ligne. Il y a une personne sur les voies.
Mais nous sommes un certain nombre – ceux du dernier wagon et une poignée de l’avant-dernier – à savoir que la personne en question n’est déjà plus sur les voies. Cinq minutes passent dans le silence. Puis cinq autres. Les questions intérieures prennent une nouvelle voie…
– C’est normal qu’on s’arrête comme ça ? s’inquiète un type chargé d’un sac à dos et d’une valise.
– Comment ils font pour vérifier qu’il n’y a plus personne sur les voies ? Ont-ils des caméras dans les tunnels ? s’enquiert une jeune femme.
Puis les soupirs se font plus forts même si contenus. Cinq autres minutes passent pendant lesquelles la voix off répète que le courant est arrêté car il y a quelqu’un sur les voies. Oui, mais non ! Il n’y a priori plus rien sur les voies, la personne étant montée dans le train dès le début… Nous attendons donc pour rien et aucun moyen de prévenir le conducteur. La situation est totalement absurde. Je pense bien à écrire la chose sur un papier, pour le montrer à la voiture d’avant etc, mais range mon carnet sûre que tout va rentrer dans l’ordre rapidement maintenant… Quelques minutes passent à nouveau, toujours dans le calme, voire le dépit consécutif à une longue semaine qui a pompé l’énergie de tout le monde. Et puis voilà que cela s’affole dans le wagon mitoyen. Celui où se trouve l’homme. Un voyageur a écrit sur une grande feuille de papier : « La personne est montée dans le train ». J’ai déjà « vu » ça quelque part… Ils nous font de grands signes pour que nous transmettions le message à la voiture 3. Du coup, je ressors mon petit carnet, retranscris la même phrase, traverse le wagon amorphe pour en atteindre le bout. Et colle ma feuille sur la vitre en essayant d’attirer l’attention des passagers de la voiture 3. Une dame me voit, ainsi que mon papier, mais n’a pas l’idée de s’approcher de la porte… Vraiment pas, ce qui me laisse un peu sans voix… Me voyant incrédule, elle se met à parloter à ses voisins, pas bien vifs non plus, qui s’approchent malgré tout… Mon trait est probablement trop clair et peu lisible, même à 40 cm… Ils ne comprennent pas. Une dame vient à mon secours.
– Si certains veulent passer leur nuit là, ça les regarde, mais pas moi !
Nous nous mettons en quête d’un feutre.
– Quelqu’un a-t-il un feutre ?
La question peut en effet paraître bizarre, à cette heure-ci, dans ces circonstances. Mais personne ne fouille dans son sac ! Pour une fois que tout le monde sait ce qu’il a dedans ! En revanche, un monsieur, bien assis sur son strapontin les jambes écartées, dit qu’il suffit de tirer la sonnette d’alarme pour parler au chauffeur. Chose qu’il n’a pas faite et qu’à vrai dire, pour une raison obscure, personne ne fait. Mais, de l’autre côté, le message semble avoir été finalement saisi. Une femme déchire une feuille de papier. Je ne vérifie pas ce qu’elle y inscrit mais j’imagine qu’elle ne va pas communiquer sa recette de la mousse au chocolat à la voiture 2. Je retourne à mon siège en répondant à une interrogation au passage.
– C’était quoi ça ?
– Quoi, le papier ?
– Oui !
J’explique.
– Ah, ok ! dit la dame en jetant un œil au wagon de queue.
Quelques minutes passent encore et un mouvement vague se produit dans la voiture 3. Tous les voyageurs se dirigent vers l’avant. Après 25 -30 bonnes minutes (et pas 1h comme j’ai pu le lire sur un blog) d’immobilisme forcé mais serein (et pas dans le noir et dans l’angoisse comme c’est indiqué sur ce même site) et d’interruption de trafic sur toute la ligne, le métro est évacué par les agents de sécurité. Voiture après voiture, ils font sortir les gens, restés placides du début à la fin, jusqu’au quai qu’avait atteint le wagon de tête. Le téléphone arabe version papier a-t-il fonctionné ? Ou est-on arrivé au bout de la procédure à suivre dans un tel contexte ? Au fur et à mesure que nous remontons les wagons en faisant bien attention au vide, d’autres agents font le chemin inverse. Certains avec des chiens… Allez, une petite dizaine de personnes au bas mot, l’air bien remonté, pour aller cueillir le perturbateur. Difficile d’anticiper une réaction a priori aussi démesurée. Que s’est-il ensuite passé dans cette voiture 5 quand ils en ont ouvert la porte ? Comment ont-ils fait pour savoir qui était le responsable de cette pagaïe de fin de journée ? Comment ont réagi les passagers ? Et l’homme, dont nous n’avions vu que le dos, qu’a-t-il fait ? Autant de questions emportées par le froid en sortant du métro pour une promenade nocturne, histoire de bien finir la journée… Réellement.
Prenons une famille à forme lambda : une femme, un homme, deux enfants. Plongeons-là dans un environnement citadin, qui ne doit pas être une trop grande ville car cela change la donne. Arrive souvent un moment où les aînés de cette famille, appelés « parents », prennent la lourde responsabilité d’acheter une seconde voiture. Pour madame. C’est bien plus pratique pour aller chercher les enfants à l’école, les amener au solfège ou au karaté, à l’heure où papa est encore au travail. Oui, oui, les nouveaux pères s’occupent désormais de cela aussi. Mais là n’est pas le sujet donc je m’autorise le trait grossier.
Le propre de cette deuxième voiture est sa taille. Car voilà ce qui se dit dans les chaumières : « On va acheter une petite voiture pour maman ! ». Comprendre : c’est papa qui a la grosse voiture… La logique voudrait pourtant que ce soit le contraire puisque c’est maman qui fait le taxi et que papa est tout seul dans sa grosse et belle voiture. Mais, à nouveau, là n’est pas le sujet. Ce qu’il y a à retenir, c’est cette affaire de taille. Affaire qui semble avoir débordé du cadre de la voiture pour toucher celui de la photographie, qui requiert un autre type d’équipement à la diversité aussi large que les automobiles mais au coût plus modéré. Ainsi, quand monsieur et madame ont un appareil photo, n’est-il pas rare de voir un zoom dépasser de celui, plus massif, de monsieur alors que madame se satisfait d’un outil plus compact et plus modeste (donnant lieu à toutes les interprétations possibles que ce couple nous offre par ailleurs et sur lequel je ne ferai pas de mauvais jeu de mots). Car c’est bien connu, madame n’a pas besoin de plus… pour faire mieux !
Il est des gens qui voyagent seuls par choix (pour être l’unique maître à bord, par exemple, et ne pas avoir à tenir compte des désidératas des uns et des autres) ou par absence de choix aussi (un célibat temporaire, une solitude non assumée, des dates de vacances incompatibles…). Voyager seul a ses avantages (liberté, flexibilité, blablabla) et ses limites : personne à côté de soi, d’intime, de proche, avec qui partager ses sensations, ses émotions ; personne à regarder, l’air entendu – celui qui sait la chance qu’il a -, face à un paysage à couper le souffle ou une situation totalement inédite ; personne, des années après, pour que cette phrase : « Tu te souviens comme c’était beau quand on était… » remporte un quelconque écho… Telle est la frustration la plus facilement exprimée, et partagée, par les vagabonds solitaires.
Ceci dit, voyager à deux n’est pas toujours la panacée ni la garantie de vivre des instants de félicité. Et il arrive parfois que le partenaire d’errance, cet être cher, ne soit pas celui que l’on imagine spontanément. Comme là. Face à cet océan tumultueux, à cette côte nimbée d’une fine couche d’embruns venant flirter avec la forêt toute proche. Ce n’est pas avec son mari, pourtant assis juste à côté, que madame s’extasie devant les éléments mais avec son chien, qui a la bienveillance de regarder dans la direction que lui indique sa maîtresse. Et voilà qu’elle lui parle, tout en lui montrant les vagues cassant sur la plage, les mouettes prises dans le vent… La femme n’en finit pas de murmurer à l’oreille de ce chien, qu’elle tient tout contre elle et à qui elle offre la totalité de sa tendresse disponible, laissant sa moitié officielle sur le ban des oubliés, derrière. Accorder plus d’attention à un animal qu’à un être humain, qui plus est présent, fera toujours naître en moi une sensation étrange, mélange d’incrédulité, d’incompréhension et d’effroi…
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Share on FacebookIl est des mots que l’on aime particulièrement, essentiellement du fait de leur sonorité. Ephémère, funambule, éclipse… En les lisant à voix haute, j’ai la sensation d’être transportée dans un pays où la musique est faite de mots. J’ajoute à cette micro liste la libellule. Libellule, libellule, libellule… Qui ferait aussi partie d’un top 10 […]
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